Après la bonne saison 1999/2000 du Paris Saint-Germain, l’actionnaire Canal+ voit les choses en grand et ne lésine pas sur les moyens afin de monter une équipe compétitive à la fois en championnat et en Ligue des champions. Plus de 500 MF sont ainsi dépensés pour recruter des jeunes en devenir — Mendy, Distin —, des joueurs expérimentés — Letizi, Déhu — et enfin des stars supposées fidéliser un public de banlieue — Dalmat, Luccin et Anelka. Ce dernier est présenté en grandes pompes lors d’un match amical de pré-saison contre les Corinthians. L’entraîneur parisien Philippe Bergeroo, en plus de ces arrivants, peut compter sur la quasi-intégralité de son groupe de la saison précédente : seul Bernard Lama et quelques joueurs d’appoint ont quitté le club. Avec ce groupe conséquent, Paris est annoncé comme un des plus sérieux prétendants au titre de champion de France.
Des débuts tonitruants
La saison commence par la réception de Strasbourg. Si les visiteurs ouvrent le score, il s’en suit une avalanche offensive et Paris l’emporte 3-1, avec un Laurent Robert qui semble déjà très en forme. Après un match nul à Rennes, et une victoire contre Sedan, les prémices du championnat sont prometteurs. Les diverses compositions d’équipe sont assez variées et le message lancé par Bergeroo est clair : vues toutes les compétitions qui attendent le club, il va s’appuyer sur l’intégralité de son groupe. Le match suivant à Metz marque un coup d’arrêt : Paris doit s’incliner un but à zéro, sur un exploit personnel d’Éric Hassli. Cette défaite est considérée comme un accident pour une équipe en rodage, et Paris repart ensuite de l’avant en battant Bastia grâce aux premiers buts d’Anelka. Paris est troisième fin août, et avec une montée en régime attendue, les perspectives sont bonnes. Seule inquiétude : Dominique Casagrande, le gardien, aura été chercher le ballon au fond des filets une fois lors de chacun de ses premières rencontres : Bergeroo doit encore trouver un équilibre défensif.
Il n’y arrivera pas pendant la trêve internationale puisque début septembre, à Troyes, Paris s’incline par 5 buts à 3 avec notamment quatre buts encaissés en seconde mi-temps — dont un coup franc de Jérôme Rothen. La défense est pointée du doigt, et une réaction est attendue pour la venue de Saint-Étienne. Bergeroo tranche dans le vif en écartant Casagrande et en titularisant Letizi, jusque là doublure. Paris encaissera un nouveau un but, mais en marquera cinq. Le potentiel offensif du PSG continue à faire peur avant de se frotter à la Ligue des champions, face à Rosenborg. Paris rate cette fois complètement sa rencontre en Norvège, et s’incline 3-1. C’est finalement une vraie tendance qui se dessine pour le PSG : systématiquement vainqueur à domicile, le club parisien est méconnaissable à l’extérieur où il fait au mieux match nul.
Le début de l’automne est donc dans la même veine avec des victoires à domicile — contre Helsingborg, Nantes, Munich et Marseille — et des matches nuls — Lens, Guingamp — ou des défaites à l’extérieur — Munich à nouveau. Le match au Parc contre le Bayern était toutefois de très haute intensité, avec des occasions à la pelle et, paradoxalement, un seul but inscrit à la dernière minute par Laurent Leroy. Il aura donc fallu attendre la venue de l’ogre bavarois pour voir Paris tenir 90 minutes sans encaisser de but. Cette performance sera renouvelée ensuite avec la venue de l’OM : Paris domine largement son grand rival, avec un Laurent Robert toujours irrésistible : en championnat, il aura jusque-là toujours inscrit au moins un but à domicile. Cette victoire permet à Paris de s’installer en tête de la D1.
Après le déplacement à Munich, qui provoquera la mise à l’écart d’Ali Benarbia [1], le PSG réussit enfin à s’imposer hors de ses bases en allant gagner à Toulouse, avec deux nouveaux buts de Robert. En championnat, les poursuivants traînent et Paris possède alors 4 points d’avance sur son dauphin. En Ligue des champions, Paris reçoit Rosenborg et peut déjà se qualifier, à condition de gagner assez largement. La condition est parfaitement respectée puisqu’au terme d’une rencontre épique, Paris s’impose 7 buts à 2 — record à l’époque — avec un Robert littéralement insaisissable ce jour-là : il est impliqué sur cinq des sept buts parisiens ! Le PSG étant leader en championnat et qualifié pour la deuxième phase de poule de Ligue des champions, on se dit alors que le recrutement onéreux est une réussite.
La vraie crise de novembre
Quelques jours plus tard arrivent au Parc des Princes les Girondins de Bordeaux et leur recrue portugaise Pedro Pauleta. Transféré fin août, le buteur avait marqué un triplé pour son premier match. Contre Paris, il ne réussit qu’un doublé — dont un lob sublime depuis le milieu de terrain —, mais un doublé qui fait mal au Paris Saint-Germain : les hommes de Bergeroo s’inclinent pour la première fois de la saison à domicile. Ce qui n’était alors considéré que comme un accroc s’avère être en fait le début d’une chute pour Paris. La liste des blessés ne cesse de s’allonger, les attaquants s’avèrent moins inspirés et la bonne formule défensive n’a toujours pas été trouvée. Letizi doit essuyer des vagues de ses adversaires, et s’il s’en sort plutôt bien, cela n’empêche pas Paris de perdre certaines rencontres. Paris s’incline à Auxerre, fait match nul à Helsingborg, concède un nouveau score de parité à domicile contre Lyon — après avoir pourtant joué une mi-temps en supériorité numérique —, et enchaîne ensuite trois défaites : à Monaco, contre La Corogne pour le premier match de la deuxième phase de poule de la Ligue des champions, et enfin contre Rennes [2].
Mais le pire est à venir. La rumeur d’un retour de Luis Fernandez ne cesse de gonfler dans la presse. Et il se murmure qu’en cas de nouvelle défaite, Bergeroo pourrait sauter. Le PSG se déplace alors à Sedan et s’incline très lourdement, cinq buts à un. Certains joueurs ont ce soir-là lâché leur entraîneur. Entre une partie des recrues qui n’appréciaient que modérément leur entraîneur, les joueurs de la saison précédente qui avaient vu leur statut de titulaire vaciller, et ceux qui auraient pu subir l’influence de Benarbia, capitaine déchu, le coach parisien n’avait clairement plus l’adhésion de tout son groupe. Et après cette soirée rocambolesque qui a vu Paris dégringoler à la 12e place du classement, Bergeroo est bel et bien remercié [3]. Après presque deux années à la tête de l’équipe première, dont seul le dernier mois aura finalement été mauvais.
Comme prévu, c’est Luis Fernandez qui prend la relève. Il obtient également le départ de Jean-Luc Lamarche, directeur sportif qui porte une partie de la responsabilité de la dernière campagne de recrutement. Fernandez n’a pas le temps de prendre la température de son groupe et doit très vite façonner une équipe pour se déplacer à Istanbul pour défier Galatasaray. La priorité du nouvel entraîneur apparait tout de suite évidente : il veut tout d’abord façonner un bloc défensif. Il met donc en place une défense à cinq éléments, et Paris réalise ce jour-là un match solide, même s’il se solde par une défaite — après un but encaissé sur penalty. Certains joueurs se montrent déjà bien plus motivés que quelques semaines auparavant. Le match de championnat qui suit, Paris renoue enfin avec la victoire en battant Metz grâce notamment à un but de Nicolas Anelka, dont la blessure qui l’éloignait des terrains s’est mystérieusement résorbée dès le licenciement de Bergeroo acté. Durant la suite du mois de décembre, Paris fait deux matches nuls et perd une nouvelle rencontre. Le PSG atteint finalement la trêve à la 11e place, bien loin des objectifs initiaux.
Luis et la relance infructueuse
Fernandez attend le mercato hivernal avec impatience, pour mettre sa griffe sur son effectif. Dalmat, Paisley et Kelban sont poussés dehors, Luis fait venir Pochettino, Vampeta, De Lucas et Arteta, et obtient le retour de Madar et Domi. Tous ces recrutements ne font pas l’affaire de certains autres joueurs qui sortent petit à petit de l’équipe, notamment Algerino, Rabesandratana et Luccin. Fernandez tranche enfin définitivement avec son prédécesseur en mettant fin à la suspension de Benarbia. L’Algérien remercie son entraîneur en marquant pour la rencontre de reprise en janvier… mais Paris s’incline 3-1 à Nancy, en coupe de la Ligue. En championnat, une nouvelle défaite est au rendez-vous, à Saint-Étienne, sur un penalty litigieux. Le mois de janvier s’achève par une qualification en coupe de France et une victoire à domicile contre Lens, en D1.
À ce moment-là, Paris peut encore espérer viser haut au bénéfice d’un redressement spectaculaire, mais les résultats alternatifs depuis la prise de fonction de Fernandez n’incitent par forcément à l’optimisme. Le mois de février est très mauvais avec quatre défaites : trois en championnat et une difficile à avaler en coupe de France face à Auxerre. Paris s’incline en effet à domicile 0-4, avec deux buts encaissés dans les cinq premières minutes de jeu. Les espoirs en championnat sont quasiment inexistants, certaines tensions sont révélées dans la presse — entre l’entraîneur et certains joueurs comme Robert et Luccin —, mais il reste heureusement la Ligue des champions. Paris a en effet joué une double confrontation face au Milan AC. En Italie, Paris a obtenu un bon match nul avec un Anelka enfin au niveau — et un jeune Arteta qui se révèle pour son premier match. Au retour, Paris réalise un match plein, mène grâce à un coup franc de Robert… et encaisse un but bête dans les arrêts de jeu.
L’objectif pour Paris est donc de se qualifier pour les quarts de finale de la Ligue des champions. Pour cela, il faudra aller défier La Corogne, en Galice. Auparavant, Paris se prépare bien en s’imposant largement contre Toulouse. Sur cette rencontre, Okocha, Benarbia et Laurent Leroy gagnent leur place de titulaire pour le déplacement en Espagne. Ceux-ci sont à la hauteur au Riazor, puisqu’ils sont les grands artisans de cinquante-sept premières minutes parfaites de la part du PSG. Paris mène en effet 3-0 grâce à deux buts de Laurent Leroy — dont un chef d’œuvre — et un d’Okocha. Mais dans les trente dernières minutes, Paris, qui reculait déjà beaucoup et qui avait eu de la réussite pour marquer en contre, craque littéralement. Cette saison, Paris n’a jamais réellement su défendre et la rencontre à La Corogne n’a pas fait exception. Le PSG encaisse quatre buts et s’incline de façon très cruelle. Il n’y aura pas de printemps européen pour le PSG qui, pour l’honneur, gagne son dernier match de poule contre Galatasaray. Cette rencontre est d’ailleurs le théâtre de graves incidents en tribunes, qui vaudront au PSG de jouer ses deux prochains matches européens à plus de 300 km du Parc [4].
Le club francilien n’a alors plus que six rencontres à jouer en championnat, sans réel objectif. Les Parisiens sont en roue libre, et l’absence de pression ne leur va finalement pas trop mal. Ils perdent deux fois (à Bordeaux et à Lyon), font deux fois match nul (à domicile contre Monaco et Lille), et l’emportent largement contre Auxerre puis à Strasbourg pour la clôture du championnat — ce sera la deuxième et dernière victoire à l’extérieur du PSG en D1 cette saison-là. Mais ce succès, glané grâce à un doublé de Laurent Robert, est loin d’être anecdotique. Paris gagne en effet deux places au classement, et termine 9e du championnat. Ce qui suffit à qualifier le club pour la coupe Intertoto. Ce qui est évidemment mieux que rien, mais à mille lieues des attentes suscitées par la plus grosse campagne de recrutement jamais orchestrée par le club parisien.
Les moments forts de la saison
En bref, quelques unes des images marquantes de la saison 2000/2001 du PSG :
Laurent Perpère, énarque en costume, qui présente Nicolas Anelka au Parc des Princes, avec son survêtement relevé et son gilet sans manche ;
Laurent Leroy qui marque à la dernière minute contre le Bayern Munich, fête son but en enlevant son maillot, et se fait enguirlander par Bergeroo dans la foulée pour le carton jaune pris ;
Laurent Robert qui slalome entre les défenseurs norvégiens lors d’un match historique contre Rosenborg ;
Dominique Casagrande qui encaisse un lob de 40 mètres de Pauleta, début de la fin pour le PSG ;
Luis Fernandez de retour, avec l’approbation de la presse et des supporters ;
la mine déconfite des joueurs après le mauvais retournement de situation à La Corogne.
L’équipe-type de la saison
Algerino, Rabesandratana, Distin, Mendy
É. Cissé, Déhu, Luccin, Robert
Anelka, Christian
Le PSG ayant connu deux entraîneurs, plusieurs schémas tactiques différents, un turnover important et une arrivé massive de joueurs au mercato hivernal, nous avons dressé l’équipe la plus crédible en suivant le nombre de titularisations.
Ont également participé à cette saison, par ordre décroissant de titularisations en D1 : Ducrocq, Dalmat, L. Leroy, Okocha, El Karkouri, Casagrande, Benarbia, Yanovski, Paisley, Pochettino, Domi, A. Cissé, Vampeta, Arteta, De Lucas, Okpara, Madar, Diawara, Abriel, Benachour.
Pierre Ducrocq, Fabrice Kelban, Edwin Murati
Florian Maurice, Edmilson, Franck Gava
Francis Llacer, Marko Pantelic, Christophe Revault
Marco Simone, Didier Martel, James Debbah
Édouard Cissé, Éric Rabesandratana
Igor Yanovski, Christian Wörns, Yann Lachuer
Mickaël Madar, Alain Goma, Bruno Rodriguez
Laurent Leroy, Grégory Paisley, Dominique Casagrande
Jay-Jay Okocha, Manuel Helder, Aliou Cissé
Xavier Gravelaine, Nicolas Ouédec, Adaílton
Bernard Lama, Nicolas Laspalles, Bruno Carotti
Laurent Robert, Fabrice Abriel
Ali Benarbia, Talal El Karkouri
Christian, César
Kaba Diawara, Godwin Okpara
Nicolas Anelka, Didier Domi
Peter Luccin, Stéphane Dalmat, Marcos Vampeta
Mikel Arteta, Enrique De Lucas, Mauricio Pochettino
Bernard Mendy, Selim Benachour
Lionel Letizi, Frédéric Déhu, Sylvain Distin
1997/1998 : de PSG-Steaua Bucarest au doublé des coupes nationales
1998/1999 : « la pire saison de l’ère Canal+ »
1999/2000 : mieux qu’une saison de transition
2000/2001 : du paradis à l’enfer