Interview réalisée vendredi 14 janvier 2011.
Les déclarations de Robin Leproux dans So Foot
Depuis l’été dernier, de nombreux supporters parisiens se sont coupés du club. Nous avons le sentiment qu’une crise de confiance s’est instaurée petit à petit. Nous souhaitons revenir sur la succession d’événements de ces derniers mois qui y ont contribué.
Oui, c’est assez bien défini, il y a une crise de confiance qui nous pose un vrai problème.
Chronologiquement, la première chose qui nous a marqués, c’est l’article de So Foot dans lequel vous avez déclaré : « Il faut que le Virage Auteuil accepte des gens tout à fait blancs dans leur tribune. Faut oser le dire : il faut une mixité dans les deux tribunes. » Nous n’avons pas compris [1].
Je vais répondre facilement. C’est exactement le principe qui a fait, par la suite, que j’ai souhaité que le public se mélange. J’ai dit au journaliste de So Foot : « Depuis toujours on dit qu’il y a une tribune blanche, à Boulogne. Ce que je souhaite, c’est que les gens très très blancs — et vous voyez à quoi je fais allusion quand on parle de tribune blanche — puissent s’asseoir les uns à côté des autres. » Maintenant en France dès que l’on dit quelque chose… On me fait le procès d’intention que je ne vois pas de blancs à Auteuil. J’ai vu des kilomètres, chez vous comme ailleurs, de commentaires disant : « Il oppose les deux tribunes racistes, il n’a jamais vu qu’il y a plein de blancs à Auteuil. » Je disais simplement que même les gens ultra blancs de cette tribune blanche, qui ont des opinions dures… Je vais même être plus précis, je prends souvent cet exemple : c’est vrai que tout a basculé après le décès de Yann Lorence. Mais un des points que je n’aurais pas pu laisser continuer, c’est que quand une famille de Maghrébins ou de noirs venaient à la billetterie, depuis des années, nous leur répondions : « Installez vous plutôt côté Auteuil. » C’est le même sujet ! Alors vous me direz que je l’ai peut-être exprimé très maladroitement, d’accord. Visiblement cela a créé un trouble puisque vous réagissez. Mais c’est cela que j’expliquais, et c’est ce que j’ai mis en application derrière. Je le ressentais très fort avant les incidents : nous ne pouvions pas rester au Parc des Princes dans un des derniers endroits ségrégationnistes en France, où on explique que c’est quand même mieux de se mettre dans une tribune plutôt que dans une autre quand on est comme ci ou comme ça.
Sur ce point nous sommes évidemment d’accord.
Non mais moi je concède… Honnêtement ce n’est pas une histoire. C’est une histoire qui a certes été montée en épingle derrière, mais ce n’est pas une histoire : il y a une part de maladresse de ma part, mais aussi une part d’avoir voulu par le jeune journaliste de So Foot retranscrire mes propos pour qu’il puisse y avoir équivoque. C’est tout. C’est la vie. C’est ma faute. Le président du Paris Saint-Germain n’a pas le droit à la moindre micro-faute… Depuis que je suis parmi vous, c’est la seule, vous n’en verrez pas d’autre.
Nous avons relevé d’autres sujets sur lesquels…
(Il coupe.) Non non, mais vous allez voir, les autres sont discutables ; ou alors c’est que je ne suis pas d’accord avec vous. Mais en terme de truc grave, sur des valeurs du club, il n’y a que celle-là. Et je veux bien dire que j’ai commis une maladresse… Mais derrière on ne m’a pas fait de cadeau.
Pourquoi ne pas avoir expliqué ce que vous venez de nous dire à Franck Annese, le directeur de la rédaction de So Foot, quand il vous a… [2]
(Il coupe.) Mais bien sûr que je le lui ai dit. Je le connais très bien Franck, nous nous connaissons depuis toujours. Mais c’est là où je vous dis que la maladresse qui a été la mienne à ce moment-là a quand même été exploitée par ce jeune journaliste stagiaire. Parce que c’est comme ça, parce que So Foot est un peu le Libé du foot, parce que c’est justement du pain béni de faire une faute dans cette catégorie-là dans So Foot. Cela fait partie du jeu… Franchement quand on le relit, et si on veut le comprendre, on le comprend. Maintenant, c’était maladroitement dit et cela prêtait à cette interprétation.
Il est tout de même difficile de bien prendre l’expression « tout à fait blanc ».
Mais c’est justement cela : parce qu’eux sont tout à fait blancs, eux tiennent à être complètement blancs et tout à fait blancs.
Pour revenir une dernière fois là-dessus, la citation exacte est la suivante : « Il faut qu’Auteuil accepte ». Et non pas : « Il faut que les gens tout à fait blancs acceptent d’aller se mélanger ». Le sous-entendu étant qu’à l’époque, à Auteuil, les gens tout à fait blancs ne rentraient pas.
Non, vous l’avez compris, vous ne pouvez pas me répéter… Je dis que c’est dans cette tribune Boulogne qu’on va trouver les fachos d’extrême droite, et même ces gars-là je dis qu’il faut qu’Auteuil accepte de s’asseoir à côté d’eux. Maintenant si vous n’êtes pas convaincus je ne peux pas vous dire plus…
L’augmentation du prix des places et des abonnements
Revenons à cet été. Le deuxième point qui nous a inquiétés et qui a fait que nous avons eu l’impression d’un éloignement d’avec le club, c’est le fait qu’en tant qu’abonnés, nous n’avons pas reçu de courrier pour nous réabonner. Nous nous sommes demandé si vous vouliez que nous revenions…
(réflexion) Si je dois me justifier, je peux me justifier. D’abord peut-être que nous aurions dû le faire. Mais admettons que nous l’ayons fait, si c’était souhaitable et que nous aurions dû le faire. On nous aurait flingués en nous disant : « Ils veulent vendre des abonnements en latérales, et ils ne veulent que les plus riches. » Je peux vous le dire, et vous le savez. Parce que le premier procès d’intention qui a été fait, immédiat, avant même qu’on ait donné les tarifs, et à la une du Parisien, c’était : « Ils veulent sortir les abonnés pour faire des trucs à l’anglaise, et augmenter le prix des places. » Or je l’ai dit publiquement, je l’ai prouvé, et je l’avais dit à mon actionnaire : « Il n’y a pas de plan sans tribunes populaires, auxquelles je tiens plus que tout au Parc des Princes ». Et nous l’avons montré puisque quand une famille peut venir voir PSG-OM à quatre pour 24 €, ce n’est pas une affaire d’argent. Si nous l’avions fait, je pense que les gars auraient même vécu cela comme une provocation. Je comprends ce que vous me dites, mais moi ce que je vous réponds, c’est : « Mettez vous à notre place. » Et à la limite maintenant j’ai la réponse, je ne l’aurais pas fait. Pour cette raison-là.
Nous reviendrons sur la communication plus tard, mais évoquons déjà le prix des places. Vous parlez de tarifs populaires : ils le sont effectivement pour une famille qui ne venait pas au stade auparavant, donc pour le nouveau public que vous cherchez à conquérir [3]. Mais pour une personne seule qui souhaite assister à tous les matches, c’est 50 % plus cher que l’an dernier.
Non.
Mais si ! Nous ne parlons pas de la place à l’unité, mais du tarif des anciens abonnés.
Non. Le moins que vous ayez pu payer, c’est 8,50 €.
Voilà, donc 12 € par rapport à 8,50 €, cela représente 50 % d’augmentation [4].
C’était même 8,70 € la moyenne, pour être précis.
Et cette année c’est 12 €, donc on ne peut pas parler de tarifs populaires pour les anciens abonnés ; cela représente même 50 % d’augmentation. Y a-t-il hausse des tarifs ou pas ? La réponse est : il y a eu hausse. On peut le prendre par tous les bouts, quand on passe de 8,70 € à 12 €, il y a eu hausse. Cela ne concernait pas tout le monde, mais tout de même 10 000 personnes [5].
Non non, il faut que nous soyons tous de bonne foi : vous étiez abonnés depuis plus de cinq ans, vous aviez la réduction fidélité, et vous étiez sur l’intégrale totale. Nous avons regardé cela de très près. Parlons d’argent : est-ce qu’il y a eu hausse ou pas pour ces gens-là ? Oui. Il faut le reconnaître. Dans ce cas-là, d’accord. Mais pourquoi avons-nous fixé le tarif à ce prix-là, avec cette hausse ? Parce que justement je me suis dit que l’abonné qui venait à 8,70 € maximum, dans l’année il viendra peut-être une fois avec un petit cousin de moins de 16 ans ou avec sa copine, et que sur deux ou trois matches il retombera sur ses pieds. Voilà comment j’ai raisonné. Et comme nous voulions montrer qu’il y avait quand même une possibilité de venir à 6 € — pour tout le monde, y compris les anciens abonnés —, il fallait trouver la cote mal taillée. Vous êtes scrupuleux, vous avez raison : pour quelqu’un qui viendra tout seul, cela fera une augmentation. Mais globalement, pour le club, vous voyez quand même que cela n’a pas été une affaire d’argent.
Sur les tarifs des abonnements cette fois-ci, en tribunes latérales BHJ bleu haut — qui sont devenues les moins chères —, les tarifs ont augmenté de 24 % en championnat à l’intersaison. Pourquoi ?
Nous pouvons en parler de la politique commerciale du club, de la billetterie. D’abord la hausse est certes spectaculaire en pourcentage, mais je me suis assuré que les prix par match n’étaient pas trop élevés [6]. Surtout, nous sommes un club qui perd 20 briques par an. Dans le même temps, j’ai demandé des efforts à mon actionnaire, justement parce que nous contraignions 12 000 personnes qui n’avaient rien fait, et qu’il fallait au moins donner une contre-partie de spectacle footballistique en amélioration. Et dans ce contexte, alors que nous savons que nous allons perdre encore plus d’argent cette saison, demander à son actionnaire de rajouter 10 briques pour acheter Nenê, Bodmer et Tiéné…
- Robin Leproux
- Photo Éric Baledent — PSGMAG.NET
La communication envers les anciens abonnés
Revenons maintenant à la communication vis-à-vis des anciens abonnés. La campagne d’abonnements et de réabonnements s’est déroulée en catimini alors que vous souhaitiez conquérir un nouveau public d’une part, et faire revenir les anciens abonnés d’autre part. Elle n’a même pas été annoncée par un article sur le site officiel par exemple. Pourquoi cette absence totale de communication ?
(réflexion) En fait le courrier a été envoyé seulement aux abonnés des tribunes latérales. On en revient à votre question précédente. Mais en revanche vous avez raison, nous aurions dû le rendre beaucoup plus visible sur le site. C’est quelque chose que nous avons mal fait, et qu’il faudra faire à l’avenir. Parce que si nous le mettons sur le site, au moins on ne peut pas nous reprocher de solliciter des abonnements deux fois plus chers, mais on ne pourra pas non plus nous reprocher de ne pas avoir promu les abonnements en soi.
Il y a eu un article sur PSG.FR, mais c’était tout à la fin de la campagne de réabonnements, et il était caché : il fallait aller dans l’onglet supporters pour le voir. Il n’y a pas eu d’article d’actualité à la une du site [7]. Dernière question sur le sentiment qu’ont eu un grand nombre d’abonnés de ne pas être invités à revenir : 5 000 places étaient proposées à la vente, alors que nous étions 13 000 abonnés. Pourquoi ne pas avoir proposé dès le départ à tous les anciens abonnés de pouvoir revenir, toujours de façon aléatoire, mais qu’au moins chacun puisse retourner au Parc ? [8] Il nous semble que c’est l’une des principales raisons du succès du boycott : le fait que tout le monde ne pouvait pas revenir.
Vous allez voir que nous sommes irréprochables là-dessus, c’est du pur procès d’intention. Parce que vous connaissez bien ceux qui menacent même d’autres pour que cela n’avance pas. Il faut que vous imaginiez les conversations que nous avons eues avec des groupes de supporters au mois de juin quand nous avons dit : « Nous allons suspendre les abonnements, et nous vous demandons de vous mélanger. » Ils nous ont répondu : « Nous allons vous faire un procès immédiatement pour mise en danger de la vie d’autrui, nous allons nous entretuer, jamais nous ne pourrons être assis les uns à côté des autres… » Il faut avoir les nerfs solides au PSG pour que le club avance et qu’il change d’image, mais j’avais tout de même une vraie inquiétude. J’ai donc dit à mes équipes : « Nous allons commencer par le bas des tribunes, et nous allons commencer par mélanger 5 000 personnes plutôt que 13 000. »
Certains me disent : « Vous nous avez virés. » C’est faux : nous n’avons jamais viré personne. Même sur le match PSG-Bordeaux [le 22 août], où nous avons vendu plus que 5 000 places, nous sommes montés. Et je peux même vous dire que sur PSG-OM, quand nous avons vendu plus de 13 000 billets, nous avons proposé des places en quarts de virages au même prix qu’en virages ! Donc c’est un vrai procès d’intention, et un mensonge. Il n’était pas question de refuser des ventes de billets Tous PSG à 12 € à qui que ce soit. Simplement au début nous serrions les fesses, et c’est le moment où on nous critiquait beaucoup sur les invitations : nous cherchions au contraire à avoir du monde dans le stade. Nous avions donné quelques milliers d’invitations en haut — pour qu’on ne leur lance pas des trucs sur la tête —, et nous nous sommes dit : « Nous allons apprendre en marchant, pour voir si notre public est capable de se mélanger. » La première des satisfactions que nous avons eue au Paris Saint-Germain a été de constater qu’il n’y a eu aucun problème, que tout le monde cohabitait. Nous disons sans arrêt que nos supporters ne sont pas des sauvages et qu’ils sont capables de s’asseoir les uns à côté des autres, et ils l’ont prouvé. La deuxième satisfaction, c’est que nous sommes en paix aux alentours du Parc des Princes.
Vous parlez de procès d’intention, mais ne s’agit-il pas plutôt d’erreurs de communication ? Parce que nous sommes nombreux à avoir pensé : « Nous sommes 13 000, ils nous proposent 5 000 places : nous n’allons jamais tous tenir, ils ne veulent pas que nous revenions tous. »
Mais je ne les ai jamais annoncées ces 5 000 !
Le communiqué diffusé à la presse en mai dernier annonçait 5 000 places en tribunes rouge, et le reste aux invitations ou aux familles.
Pas du tout ! Je vous assure que c’est faux.
Nous ne l’avons pas sous la main pour vérifier…
Nous en reparlons si vous voulez par mail, ce n’est pas du tout comme vous dites. Lisez le bien.
Ce serait formulé comment selon vous ?
Nous disions : « Nous commençons par le bas. » Et ensuite nous expliquions où sont situées les familles, etc.
La partie basse des deux tribunes soit environ 5 000 places seront commercialisées par l’intermédiaire de billets nominatifs à destination de sièges numérotés (un adulte qui présentera sa pièce d’identité ne pourra acheter plus de trois autres places, son nom sera inscrit sur chacun des billets) ; le spectateur sera placé aléatoirement en tribune Auteuil ou Boulogne, il ne peut choisir sa tribune de destination.
Invitations d’enfants des clubs de l’Ile de France par la « Fondation PSG » (accompagnées de leurs éducateurs uniquement), dans la partie haute d’Auteuil et Boulogne soit 4 000 places environ.
Les parties médianes de chaque tribune y compris la G soit près de 4 000 places deviennent des « tribunes familles » réservées à un adulte accompagné d’au moins un enfant de moins de 16 ans ou d’une femme.
En tribune G la partie haute sera réservée aux invités de la mairie de Paris, la médiane aux familles et la basse sera commercialisée nominativement comme ci-dessus.
Si vous avez raison, il y a vraiment un malentendu.
Mais c’est plus que cela, c’est de la mauvaise intention. Quand on dit « viré » c’est tout simplement inacceptable, puisqu’il n’y a pas une personne à qui nous avons refusé un billet depuis le début de la saison.
Mais c’est aussi en raison du boycott que vous ne vous êtes pas retrouvés dans l’incapacité de vendre une place à 12 €. Le sentiment à l’époque — cela a en tout cas été compris comme cela même si ce n’était pas formulé ainsi — était le suivant : « Il y a un stock de 5 000 places, alors que nous étions 13 000 et qu’ils cherchent à attirer un nouveau public. »
C’est un procès d’intention.
À nos yeux il ne s’agit pas un procès d’intention, mais d’une interprétation légitime.
Parce qu’on vous l’a relayé comme cela.
Non, c’est en lisant le communiqué de presse diffusé sur PSG.FR que nous l’avons compris de cette manière : « Nous ne pourrons pas tous revenir. »
Eh bien c’est faux. Je l’ai dit en juin, je l’ai dit publiquement, et nous l’avons vécu sur le match de Bordeaux en tout début de saison, où nous avons dépassé complètement le quota de 5 000 places, et depuis nous avons même dépassé les 13 000 puisque nous avons vendu à 12 € des places en quarts de virages contre l’OM.
Nous avions besoin de vous entendre dire ces choses-là. Mais nous estimons suivre de très près l’actualité du PSG, et nous ne vous avons pas entendu les dire à l’époque. Si ce que vous affirmez est vrai, il faut s’interroger sur le fait que ni L’Équipe ni le Parisien n’en a parlé.
Vous ne parlez pas des trains qui arrivent à l’heure…
Germain le lynx et le public de consommateurs
Nous sommes nombreux à ne pas nous être reconnus dans les mesures prises à l’été dernier — Germain, le vous-vous-z’êtes-là ou Valérie dans les tribunes —, et à avoir eu l’impression que c’était un public de consommateurs-spectateurs que vous recherchiez. Aujourd’hui ces choses-là ont manifestement été mises en retrait, il semblerait que Germain n’existe plus…
On est totalement dans le procès d’intention une fois de plus. J’ai toujours dit que je tenais au public populaire, au public historique, que je regrette franchement d’avoir donné des contraintes à 12 000, 12 500, peut-être 13 000 personnes qui n’y étaient pour rien dans ces incidents, mais que c’était le moyen de se débarrasser de ceux qui étaient violents, qui étaient quelques centaines, et dont nous n’avons jamais réussi à nous débarrasser. Jamais je n’ai eu d’arrière-pensée mercantile là-dessus. Nous avons parlé du prix des billets. Concernant Germain, je trouve regrettable, alors que souvent on a des histoires avec son père ou son grand-père qui nous amène à 9-10 ans la première fois pour voir un match au Parc, que l’on accepte pas que les gamins adorent Germain, qui existe et qui vit sa vie depuis le début de la saison.
Germain existe encore ? Nous ne l’avons jamais vu…
Bien sûr que vous ne l’avez jamais vu, il est dans les coursives. Il est à sa place, dans les animations que nous réalisons pour les enfants, qui sont ravis. On dirait que Germain c’est le diable… Rennes fait l’hermine, les grands clubs internationaux le font, et nous nous n’aurions pas le droit, pour les gamins, de faire Germain le petit lynx ? Un peu de tolérance les uns envers les autres…
Si les tribunes familles avaient été créées en tribune E bleu, qui est fermée quasiment toute l’année, cela n’aurait sans doute pas posé de problème. Là c’est le fait que ce soit dans les virages qu’on impose…
(Il coupe.) Vous le savez pourquoi, je vous l’ai expliqué. Et justement nous essayons d’indiquer à nos supporters historiques que nous ne sommes pas allés mettre Germain au milieu de la pelouse, gambader partout à l’échauffement, parce que cela aurait été vécu comme de la provocation. De la même manière qu’on nous avait dit : « Ils vont changer le nom des tribunes Auteuil et Boulogne. » Je trouve que cela aurait été gratuit, et vécu comme une provocation. Ce n’était donc pas la peine. Mais Germain, je suis désolé, il a le droit d’exister pour son public. Peut-être qu’un jour on le verra sur la pelouse, et il faudra être un peu plus tolérant.
Ce n’est pas une question de tolérance…
(Il coupe.) Mais si ! D’intolérance.
Germain est le symbole d’un public de consommateurs qui ne va pas attendre la même chose de son rapport au stade.
Mais pourquoi vous dites cela ? Un gamin qui arrive une heure avant le match, il faut quand même lui donner quelque chose qui correspond à son âge, bon sang. Mais vous voyez comment c’est exécuté, vous pensiez qu’il n’existait même plus…
Michel Mimran [le directeur marketing] annonçait cet été dans la presse qu’on le verrait sur la pelouse… [9]
C’est pour cela que je dis que tout le monde sur-réagit, tout le monde est à fleur de peau. Il faut être détendu par rapport à tout cela. La priorité, aujourd’hui, c’est que le public historique revienne. C’est celui qui fait la ferveur, et nous avons besoin de lui. Mais il faut que chacun mette de la bonne volonté. Jamais nous ne diabolisons ce public en disant : « Il est raciste, il est violent. » Non : il fallait que nous nous débarrassions d’une partie des gens violents qui étaient dans les deux tribunes, que ce public global parvienne à se mélanger, et que — j’espère le plus vite possible — nous retrouvions la normalité. Et que ce soit le prix des places ou Germain, il ne faut pas être sans cesse dans la défiance entre nous.
Toutes ces petites mesures ont participé d’un éloignement progressif d’avec le club. Nous ne nous reconnaissions dans rien de ce qui a été annoncé à l’été…
Mais prenez du recul. À côté de cela, le plus important était de travailler sérieusement sur le sportif avec l’entraîneur. Mon boulot de président, c’est de permettre que l’équipe se renforce dans les mercatos sans trop se planter, et ensuite de faire en sorte que ce groupe sportif puisse donner le meilleur de lui-même. Et que ce soient les joueurs, Antoine [Kombouaré] ou moi, je pense que nous progressons. Donc il faut se décontracter, profiter du spectacle que nous donnent nos joueurs aujourd’hui, être un peu moins en défiance les uns les autres. Il n’y a pas de provocation de la part de la direction du club envers son public historique. Il n’y en a pas. Regardez Germain : nous ne sommes pas là à le balader partout… Je suis d’accord avec vous, cela aurait été fou. Et nous ne l’avons pas fait. On pense qu’on l’a planqué ? Non, il a toujours été destiné à ce public-là. Mais je ne m’interdis pas qu’un jour Germain se montre parce qu’il y aura une animation avec des gamins.
synthèse de nos entretiens avec les supporters
Robin Leproux répond à nos questions (1/2)