Formé au club, lancé en pro en 1975 par Just Fontaine, Jean-Marc Pilorget n’a pas quitté le PSG avant 1989. Entre temps, le défenseur central — qui a joué quelques saisons au poste d’arrière droit — n’a connu qu’un court intermède d’un an : un prêt à l’AS Cannes en 1987/1988. Bilan de cette carrière parisienne : 435 matches joués au PSG, et un record qui n’avait jusque-là jamais été proche de tomber. Et encore, sans un accident de voiture fin 1983, qui l’écartera des terrains pendant un an et demi — et qui lui coûtera sa carrière internationale [1] —, il est probable que nous ne serions pas en train d’envisager qu’il soit dépassé un jour par un autre footballeur.
Mais aujourd’hui, Sylvain Armand pointe le bout de son nez. D’ici la fin de saison — si Paris prolonge ses parcours en coupes — ou en début de saison prochaine, il dépassera Bernard Lama, et deviendra le quatrième joueur le plus capé du PSG. Et en cours de saison 2011/2012, il dépassera très probablement Safet Susic et Paul Le Guen pour devenir le numéro 2. Dans sa ligne de mire, il ne restera alors plus que Jean-Marc Pilorget, un peu moins de 100 matches devant. Un chiffre qui semble a priori difficile à rattraper… Et pourtant, si Armand continue sur les bases qui sont les siennes, en 2013, dans la colonne records du club, il faudra lire son nom. Car si Armand n’a jamais pu échapper aux critiques qu’un long passage au PSG engendre inévitablement, il a une qualité indiscutable : c’est un roc. Depuis 2004, date de son arrivée au club, Armand n’a que très rarement renoncé à une rencontre sur blessure — mis à part sa torsion au genou au printemps 2009, qui généra une absence d’un petit mois. Au final, il joue ainsi une cinquantaine de rencontres par saison en moyenne — plus ou moins selon les divers parcours du club parisien en coupes. Les 126 matches qui le séparent aujourd’hui de Pilorget seront donc comblés dans deux ans et demi, et Sylvain Armand n’aura alors « que » 33 ans, ce qui n’est pas rédhibitoire pour celui qui est désormais défenseur central.
Bien sûr, en deux ans et demi, il peut s’en passer des choses. Armand pourrait très bien souhaiter partir, ou le PSG ne plus vouloir de lui… Ceci semble toutefois peu crédible aujourd’hui. Armand est attaché au PSG, c’est sûr. Il a connu les saisons les plus galères du club, a été contacté par un club plus huppé — Lyon qui marchait sur le championnat à l’époque —, et a toujours choisi de rester au club, où il a pourtant perdu sa place en fin de saison dernière… Si Armand avait dû être atteint par une forme de lassitude et avait tout fait pour partir, cela aurait déjà été le cas. À 30 ans, il semble plutôt être dans l’optique de finir sa carrière dans la capitale. Quant au fait que les dirigeants ou entraîneurs parisiens pourraient le pousser vers la sortie, à moins d’une baisse spectaculaire de performances, cela semble difficile à imaginer. En bout de course au poste d’arrière gauche, Sylvain Armand a parfaitement rebondi en tant qu’arrière central. Il est devenu le complément idéal de Sakho — permettant à celui-ci de franchir un pallier —, et réalise des performances individuelles de haute volée. Un indicateur parmi d’autres : au classement des notes du journal L’Équipe, Armand est actuellement le premier défenseur et le troisième joueur de champ [2]. Pour faire simple, Armand est au top, et s’impose comme l’un des meilleurs joueurs de l’effectif. Le PSG devrait donc compter sur lui quelques saisons encore.
Armand peut donc sérieusement envisager de dépasser le record de Pilorget. Mais doit-on le souhaiter pour autant ? Les plus nostalgiques auront certainement du mal à admettre qu’un représentant de ce qui n’est pas la période la plus reluisante du club — pour l’instant — soit en mesure de taquiner un joueur emblématique des premiers succès du PSG. Alors bien sûr, voir les noms de Dahleb, Susic ou autres reculer dans la hiérarchie fera toujours un pincement au cœur. Mais les records sont aussi faits pour être battus. Et quelque part, que Pauleta dépasse Rocheteau au nombre de buts il y a trois ans, et qu’Armand grimpe petit à petit dans la hiérarchie de l’assiduité, cela montre que le club est bel et bien vivant et que, année faste ou non, l’histoire du club continue à s’écrire. Et finalement, qu’un joueur travailleur, qui n’a jamais râlé et qui a accepté de jouer à de nombreux postes pour dépanner [3], un joueur qui s’inscrit dans la durée et qui reste au club malgré toutes les turbulences, à une époque ou d’autres changent de formation dès que le menu de la cantine ne leur plaît plus, qu’un tel joueur puisse devenir le plus capé est symboliquement on ne peut plus positif. Et peut-être qu’un jour, un certain Mamadou Sakho, qui compte déjà plus de 120 matches à tout juste 21 ans, voudra lui aussi tutoyer ces records…