[Billet] PSG-OM : sur la bonne voie

Côté PSG, les dirigeants ont su rester discrets avant d’accueillir l’OM. De toutes façons, les déclarations guerrières entre entraîneurs semblent désormais passées de mode. Non, ce sont davantage les soucis liés aux supporters qui auront animé les journées précédant la montée des Marseillais à Paris. Journées qui auront donné lieu à un formidable étalage d’égoïsme et de crises d’amnésie intense.

Commençons par les supporters de l’OM qui se déclarent insultés qu’on les interdise de déplacement. Vous pensez : des fans lambda que l’on empêche d’aller soutenir leur équipe à l’extérieur. Du jamais vu ! À part l’an passé quand toute personne arborant une écharpe du PSG aux abords d’un stade de province était raccompagnée manu militari au commissariat… On n’avait alors guère entendu les Tonini et compagnie s’élever contre ces mesures consistant à mettre tous les supporters du PSG dans le même sac. Là en revanche, une fois les champions de l’égocentrisme confrontés à la même situation, ils s’aperçoivent tout à coup de son iniquité !

Ensuite, il y a les dirigeants de l’OM, qui auront tout de même réussi à nous expliquer que chez eux au moins, il n’y avait aucun problème de violence. Entre la bagarre générale qui a eu lieu au Vélodrome il y a peu et l’accueil renversant des supporters du PSG l’an passé à la même époque, on ne saurait trop conseiller à Dassier et Anigo de tenter le dépistage d’un Alzheimer précoce. Pourtant, il paraît que le poisson est très bon pour la mémoire : pour des fans de la bouillabaisse, on aurait pu espérer mieux.

L’avant-match aura donc donné lieu à une victoire parisienne. Ce qui flatte l’ego, mais n’a pas de sens si, sur le pré, les joueurs ne montrent rien. Or, ici aussi, le PSG sort grandi de la comparaison avec l’OM. Et il ne s’agit même pas de rabâcher le score final, ou de lister les coups de coude et autres amabilités échangées des deux côtés. Diawara semble par exemple maîtriser avec difficulté le concept du paillasson, persuadé que le maillot d’un joueur brésilien ferait tout aussi bien l’affaire pour s’essuyer les crampons… Ce qui ne poserait d’ailleurs pas tant de problèmes s’il attendait que le joueur quitte son maillot avant de procéder.

La gestion de ces contacts en revanche donne de précieux enseignements. Là où certains préfèrent se relever pour aller expliquer de vive voix leurs reproches à l’adversaire, ou garder leur calme et répondre par le jeu, d’autres auront préféré rester de longues minutes étendus, à goûter la douce fraîcheur du gazon parisien. Si l’on savait déjà Valbuena amateur du roulé-boulé 3 500 tours/minute, il aura été plus surprenant de retrouver Gignac dans cette catégorie. Le presque-buteur marseillais poussant l’amour des choses bien faites jusqu’à un sketch merveilleux à la demi-heure de jeu : alors que son compère Valbuena venait de régaler les amateurs de patinage d’un enchaînement double axel-triple motte de terre piquée, Gignac crut bon de s’offrir une petite pause à son tour. Et c’est devant un Parc médusé que les Marseillais se retrouvèrent réduits à 9, menés 2-1, avec deux joueurs en train de se faire soigner.

N’ayant pas vu le match à la télévision, je ne sais pas ce que Canal+ en aura montré, mais depuis les tribunes, la souffrance de Gignac égalait au moins celle de Jeunechamp la semaine dernière. Impossible pour lui de poser le pied par terre tant la blessure paraissait grave. Enfin jusqu’à ce qu’il s’aperçoive que son entraîneur lui intimait l’ordre de rentrer en jeu au plus vite. Et là, tout à coup, l’ancien Toulousain jusqu’ici porté à grand-peine par deux soigneurs abandonnait sa démarche clopinante pour courir sur le bord de la touche, sous le regard médusé des supporters parisiens. Comme quoi, s’il ne sait plus quoi faire après sa carrière d’entraîneur, Deschamps pourra toujours envisager une reconversion dans le domaine du maraboutage exorcisme guérison miraculeuse que l’être aimé revient vers toi en courant après trois séances, même s’il s’était fait arracher le genou sur l’action d’avant. Trop fort.

En revanche, en ce qui concerne le guidage sur autoroute, là, je crains qu’il ne faille quelques temps avant que le coach marseillais ne soit efficace. Deschamps aura tout de même réussi l’exploit de se perdre sur le périphérique la veille et le jour du match ! Ce qui laisse rêveur c’est que les Marseillais aient été assez stupides pour réserver un hôtel à l’autre bout de Paris, porte de Bercy. D’autant plus que 90 % des adversaires du PSG réservent le Novotel du Pont de Sèvres ou le Mercure de la porte de Saint-Cloud, situés à un jet de Valbuena du Parc. Mais surtout, qu’ils n’aient pas prévu qu’il y aurait d’inextricables embouteillages autour de Paris un soir de match !

Le souci des Olympiens, c’est qu’ils ont tendance à croire que ce qui se passe dans Taxi 4 est réel. Non, dans la vraie vie les flics top modèles danoises ne se tapent pas leurs collègues provençaux, et il n’y a pas de chauffeur susceptible de sortir d’ailerons de sous le bus pour voler au-dessus de la porte d’Orléans. D’ailleurs, dans la vraie vie Samy Naceri n’a plus de permis depuis longtemps…

Alors après l’herbe qui est trop haute, les rencontres trop rapprochées, et l’arbitre trop vilain, les Marseillais nous inventent en conférence d’après-match la défaite à cause du GPS qui est en panne. Respect. Deschamps aurait pu évoquer le gardien qui est trop manchot ou l’attaquant à 25 M€ qui a les pieds trop carrés, mais bon… Chacun son truc !

Mais le pire dans cette affaire, c’est que si ça se trouve, même au retour ils se sont plantés de route…

Match de merde, temps de merde, conférence de presse de merde et routes de merde. Assis au premier rang dans le bus, juste derrière le conducteur aux poignets tatoués et à la traditionnelle raie des fesses à l’air, l’entraîneur marseillais s’arracha à son analyse de la journée. Bizarre, ce chemin ne lui disait vraiment rien. « Dites donc, vous êtes sûr que nous empruntons bien la route qui mène à l’aéroport là ?, demanda Deschamps. — Eh bien en fait, répondit le chauffeur, pas vraiment… » Arrachant sa tête à la vitre trop froide, le coach marseillais se pencha vers le dos du conducteur, plongé dans l’ombre : « Comment ça, pas vraiment ? Vous nous emmenez vers l’aéroport là ou pas ? — C’est-à-dire que je n’ai pas trop l’habitude… — Mais comment ça pas l’habitude ? Vous êtes chauffeur, oui ou non ? » Alertés par les hurlements de leur coach, les joueurs s’occupaient désormais à déchiffrer l’étrange accent du conducteur. « Oh, ça oui, maintenant je suis chauffeur. Seulement… » Pour éviter un nouveau psychodrame, et se remémorant le spectacle de Valbuena roulant en pleurs sur le long tapis menant du vestiaire jusqu’au car, Deschamps ferma les yeux, puis compta lentement jusqu’à cinq avant de relancer la conversation… « Seulement ? … » Le chauffeur, toujours tourné vers le macadam répondit dans un haussement d’épaule pas franchement désolé : « Seulement pas depuis très longtemps, c’est tout. C’est une reconversion. — D’aaaaccord. Euh, par curiosité, vous savez que nous devons reprendre l’avion ce soir ? — Oui, oui, je m’y connais en foot. C’est plus de choisir la route qui me pose problème en fait. » Deschamps soupira. Céder à son envie de demander à Diawara de montrer au conducteur comment on se nettoie un mocassin à gland à Marseille n’arrangerait rien : personne d’autre n’avait son permis poids-lourds dans l’assistance. Aussi l’entraîneur enchaîna-t-il d’une voix beaucoup trop calme : « Et donc vous comprenez que nous soyons pressés de rentrer chez nous ? — Oui, bien entendu, je ne suis pas stupide. C’est juste que je ne suis pas encore tout à fait sûr de la route, c’est tout ! Et si vous pouviez lui expliquer que ce n’est pas en sautant à cloche-pied dans le couloir que Gignac m’aidera à retrouver mon chemin… Moi si ça continue, je pose la veste et je me tire ! — Dites donc, comment osez-vous nous parler sur ce ton ? Après le sketch que vous nous avez fait sur le périph’ à l’aller ? Et d’où… Putain mais on est sur l’autoroute de l’est là ! Vous nous emmenez droit en Allemagne ! » Ce n’est qu’une fois debout aux côtés du levier de vitesse que le coach comprit ce qui clochait depuis le début de cette funeste journée… « Kezman ? »