Le journaliste Frédéric Gouaillard prédirait l’avenir, ça ferait longtemps qu’on l’aurait embauché à la Société Générale ou sur Bet Clic. Un talent de ce genre, il y aurait quand même moyen de se faire un peu d’argent avec. Alors que là, non, son truc c’est de prévoir les événements après qu’ils se sont finis… Et là, à part au Parisien, les débouchés sont tout de même moins nombreux. Voilà ce que cela donnait, dans l’édition du lundi 25 octobre :
Paris a rechuté hier. Franchement, on pouvait se douter que cela arriverait un jour et, encore plus, après un match de Ligue Europa. Auxerre s’est simplement montré plus réaliste et ambitieux que Rennes et Nice, venus récemment au Parc pour rapporter un simple match nul.
Quel talent ! En toute franchise, et je serais tenté de rajouter en toute modestie, Frédéric Gouaillard peut l’avouer aujourd’hui : il se doutait qu’un jour ou l’autre le PSG perdrait de nouveau ! Je dis bravo. Il faut savoir s’incliner devant ce qui vous dépasse, et là, est-ce un sixième sens ou une implacable martingale mathématique née d’un cerveau génial, dans tous les cas le journaliste du Parisien bluffe son monde. Ça n’était pas évident que Paris se ferait de nouveau battre. Un jour. Alors réussir en plus à en prédire la date exacte, et ce dès le lendemain… Grand respect !
Si ça se trouve, Frédéric Gouaillard saura nous dire après la prochaine victoire qu’il sentait confusément que, tôt ou tard, le PSG réussirait de nouveau à conquérir les trois points ? En attendant, et au cas où nous n’aurions pas bien compris, il enfonce le clou :
Non, cette fin de série, après huit matches sans défaite, n’a rien de surprenant.
Alors OK, il a deviné tout ça après coup, mais bon, on ne va pas non plus briser ses rêves. Il semble si content de nous expliquer qu’il parvient à deviner le résultat des matches après leur fin, ça lui fait tellement plaisir… D’autant que dans le reste de l’article, le reporter déploie de nouveau des trésors d’audace dans ses analyses de fond.
Le remplacement de Hoarau par Sessegnon et le repositionnement de Nenê en attaque à l’heure de jeu ont en effet rendu cohérence et allant au jeu parisien. Le PSG aurait même pu ambitionner le nul — et peut-être mieux encore —, si Erding et Sessegnon étaient parvenus à transformer leurs occasions.
Quelle prise de risque ! À part le sang-froid offert par ses dons de devin à rebours, comment expliquer que Frédéric Gouaillard puisse avoir l’inconscience de s’engager sur des thèses aussi ambitieuses ? Il nous soutient tout de même qu’alors qu’il était mené d’un seul but en fin de match, si seulement le PSG avait marqué alors il aurait pu espérer le match nul ! Le truc de fou.
C’est là qu’on se dit que la presse écrite a encore un bel avenir devant elle : comment remplacer cette aura de compétence ? Non, derrière les prédictions du passé, il y a plus que du travail, plus qu’une exigeante formation. Il y a du génie. En salle de rédaction, ça doit envoyer du lourd… Parce qu’entre le petit dernier qui cherche à gagner sa place, Fred Gouaillard, le numéro un toujours obligé de remettre son statut en jeu, Arnaud Hermant, et l’éternel outsider, Christophe Bérard, l’émulation doit tourner à plein…
— Frédéric Gouaillard : Alors là, je vous l’avais bien dit. Le PSG allait bien finir par perdre un match, un jour. — Arnaud Hermant : Attends bonhomme, tu te calmes, moi ça fait des années que je suis persuadé que ça va être la crise au PSG, donc tu restes à ta place ! — Christophe Bérard : Ouais : le talent de devineur du passé, t’es pas le seul à l’avoir. Regarde, moi, j’avais déjà mis un 3,5 à Tiéné après le match nul à Dortmund. Tiéné avait pas été mis en danger de la partie, mais je me doutais bien qu’un jour, le PSG allait encaisser de nouveau des buts ! Alors ? — Frédéric Gouaillard : N’empêche que je reste persuadé que si dimanche soir le PSG avait marqué plus de buts, il aurait peut-être obtenu le point du match nul. Voire gagné la rencontre ! — Arnaud Hermant : Pfff… Tu la ramèneras moins quand tu liras mon prochain dossier. J’y explique que si les Parisiens perdent contre Lyon en coupe de la Ligue, eh bien ils seront purement et simplement éliminés de cette compétition ! — Christophe Bérard (admiratif) : Oh… — Frédéric Gouaillard : Ah bon ? Et t’es sûr de ce que tu avances ? Parce que ça me semble un peu gros quand même. — Arnaud Hermant : On verra ce qu’on verra. J’ai mes sources ! — Christophe Bérard : En attendant, quand je sortirai mon article qui dévoile que les joueurs du PSG gagnent plein d’argent, ça va vous calmer. — Frédéric Gouaillard : Tout ça ne vaudra jamais le papier que je sors la prochaine fois qu’un joueur se blesse : je dirai — attention les yeux — qu’en fait il ne fallait pas le faire jouer ! — Christophe Bérard : Sauf que les joueurs du PSG, ils gagnent encore plus avec leurs primes ! Qui c’est qui est boulé là ? — Arnaud Hermant : De toutes manières ça ne m’empêchera pas d’écrire que si Paris perd tous les matches du mois de novembre, alors ce sera la crise ! — Laurent Perrin : Les gars, vous pourriez faire moins de bruit ? J’ai une interview de l’avocat de Rothen à boucler moi. Une exclu de fou : il dévoile que si Kombouaré persiste à ne plus le faire jouer, alors Rothen refusera de porter le maillot du PSG tant que le Kanak sera encore entraîneur à Paris !
Quand même, ils ont une de ces exigences de résultats dans ces journaux. Les joueurs du PSG, ils peuvent passer au travers et se rattraper au match suivant. Au Parisien, non : l’excellence, toujours l’excellence… Dur métier.