Les supporters du PSG quittent souvent le Parc convaincus que les visiteurs du jour ont disputé contre Paris leur turbo-match de l’année. Gardiens infranchissables, frappes de 40 mètres vrillées sous la barre, contre en mode laser qui traverse le pré en trois passes aveugles, défenseurs qui se transmutent en modèle muraille de Chine, remplaçants au taquet qui courent pour la première fois de leur vie… Tout ça parce qu’ici, c’est Paris ! Fantasme du fan qui voudrait se donner trop d’importance, ou réalité ? Difficile à dire : après tout, même le directeur général de Nice semble persuadé que le reste du monde est constitué d’une nuée d’opposants qui en veulent à son propre club [1].
Alors quand le Paris Saint-Germain rencontre l’OL, pas étonnant que certains amoureux du club francilien défendent la théorie a priori absurde de Lyonnais sur-motivés, et prêts à tout pour battre le club de la capitale. Par exemple Alain Cayzac, dans son livre Passion Impossible, à propos du PSG 1-1 Lyon de mai 2007 :
Certains Lyonnais, dont Patrice Bergues, adjoint de Gérard Houllier, déjà assurés de leur sixième titre avant la rencontre, célèbrent ce but comme s’il s’agissait du plus important de leur histoire. Pourtant, il ne représente pas grand-chose pour eux sinon la satisfaction de ne pas perdre contre le PSG, ce qui est finalement beaucoup.
Pour l’anecdote, ce petit but du match nul coûtera à Paris deux points… mais surtout 4 M€ — en droits TV —, à cause de la chute au classement qu’il provoquera. Alors : remarque fumeuse d’un président aigri par un échec que ces 4 M€ auraient peut-être pu empêcher, ou analyse impartiale d’un fin connaisseur du football ?
Comment les Lyonnais, multi-titrés, multi-convoqués en équipe de France, multi-récompensés par tout ce que les médias inventent d’Oscars, trophées et autres breloques, comment pourraient-ils retirer un plaisir particulier à battre le PSG ? Après tout, Jérôme Touboul ne s’échine-t-il pas à expliquer à qui veut le lire que Paris n’est plus qu’une équipe comme les autres ?
À l’entendre, les Lyonnais n’auraient donc aucune raison valable de se transcender : face à un club en crise perpétuelle, et qui n’intéresse plus personne, à quoi bon ? Sauf qu’en remontant un peu dans les archives de la L1, on trouve quand même d’étranges indices, pour soutenir la thèse supposée branlante du président Cayzac. Comme cette déclaration de Grégory Coupet, citée le 10 juin 2003 dans France Football :
J’adore la défense du PSG. Ces Potillon, Pochettino, Heinze, Cristobal… J’aime leur hargne, leur volonté, leur mentalité. J’aurais adoré me retrouver derrière eux.
Qui a entendu Letizi louer les qualités de Caçapa et Müller, à la même époque ? Quel Parisien aurait, depuis lors, tenu des propos équivalents ? On n’ose imaginer le tollé qui s’ensuivrait en tribune ! Pourtant, vus les résultats et la tranquillité avec laquelle Lyon enchaînait les bons résultats, on aurait pu comprendre une certaine envie… Mais rien.
Étrange tout de même, cette admiration assumée du gardien lyonnais pour ce qui n’était qu’un club adverse. Et si, depuis, Coupet a pu se rendre compte que signer au PSG, ce n’était pas forcément le pied, il ne reste même qu’un exemple d’admirateur du club parisien parmi d’autres ! En effet, même au plus haut de la hiérarchie rhodanienne, certaines interviews ont de quoi troubler.
Le complexe du président de province
Jean-Michel Aulas lui-même a pu prêter à confusion dans sa relation avec le Paris Saint-Germain. Jamais avare d’une crasse à l’encontre des Rouge et Bleu sur le marché des transferts, le président de l’OL prête le flan à de cuisantes remarques. Comme celles de Pauleta, tirées du livre de Daniel Riolo par le Parisien du 23 octobre 2008 :
Je pense qu’au fond de lui, ce qu’il [Aulas] aimerait, c’est diriger le PSG. Il en parle beaucoup. Le mercato d’hiver 2007/2008 en est, à ce titre, l’illustration parfaite. C’est lui qui nous dit si on doit prendre tel ou tel joueur. [L’ex-Parisien fait notamment référence à une interview accordée l’hiver dernier par le dirigeant lyonnais à notre journal dans laquelle il se dit prêt à céder le Brésilien Fred au PSG.] Le rêve secret d’Aulas, c’est d’être à Paris. Pour un type qui a un tel ego, Lyon est trop petit. Il lui faut une ville à sa mesure. Il lui faut la capitale. A Lyon, cela devient trop confiné pour lui. […] Son désir refoulé, c’est d’être au PSG.
Ce qui a motivé un tel jugement ? Une litanie d’appels du pied, et qui ne datent pas d’hier. Pour preuve ce discours halluciné, dans le Parisien du 21 novembre 2008, qui a dû réchauffer le cœur des supporters lyonnais :
— En 2006, quand le PSG était à vendre, vous aviez dit que vous rêviez d’investir dans ce club… — En tant qu’investisseur, je pense que c’est une très bonne affaire. Paris possède tous les ingrédients pour transformer le PSG en une structure financière extrêmement pertinente. J’aurais été très content d’investir dans le PSG, à ce titre-là. Ce n’est plus possible aujourd’hui. Jean-Michel Aulas, en tant que président et actionnaire important de Lyon, ne peut pas investir dans le PSG.
Alors, quelles sont les vraies relations fantasmées de JMA avec le Paris Saint-Germain : simple investisseur le président d’OL Coiffure, ou amoureux frustré ? Quand les allusions se multiplient, le doute finit pas s’instiller :
C’est prestigieux de venir jouer à Paris. […] À Paris, j’aurais fait aussi bien qu’à Lyon. Ce n’est pas donner un mauvais point aux autres. Simplement, Paris est une capitale.
Paris capitale, ce que Lyon n’est pas, et ne sera plus. Ces derniers jours encore, Aulas ne pouvait s’empêcher d’exhiber ses sentiments en public, dans un entretien accordé au journal le Parisien. Ça en deviendrait presque gênant…
Ce sera un gros match entre les deux équipes les plus importantes du championnat, même si elles ne sont pas aux premières places. Le PSG a de la moelle. C’est un match qu’il ne faudra pas perdre et surtout gagner.
Des joueurs obsédés par le PSG
Mais des présidents que la ville lumière attire, des clubs qui comptent un joueur déclarant maladroitement une certaine admiration pour certains adversaires, cela ne se trouve pas qu’à Lyon. Non, la particularité de l’OL, c’est l’étrange multiplication de ces marques d’affection. Quelle maladie frappe le vestiaire lyonnais pour qu’on y parle si souvent de Paris ?
Certains soupirants rhodaniens sont célèbres. Outre Giuly et Luyindula, qui ont fini par signer au PSG, et Bodmer, dont chacun sait vers quel club le cœur penche, il y a ceux que l’on n’attendait pas. Comme Aly Cissokho, qui avouait dans les colonnes du Planète Lyon d’hiver 2010 :
J’avais admiré pendant des années l’Olympique lyonnais avec tous ces grands joueurs que j’aimais : Abidal, Essien, Mahamadou Diarra… Une équipe qui gagnait toujours. Même si je ne les supportais pas. Moi, c’était le PSG !
Encore une fois, parmi les jeunes du PSG, qui en a déjà entendu un déclarer sa flamme pour les bords de Saône ? Autre exemple, le jeune Mounier, parti de Lyon pour jouer à Nice et qui répondait aux journalistes du Parisien, le 8 juin 2009 :
— Le PSG s’intéresse à vous. Pourriez-vous rejoindre la capitale ? — Je ne crois pas. Cela m’a fait plaisir de savoir qu’un club comme le PSG se penche sur mon cas. Mais à Paris, je serais pris comme une doublure côté gauche. Et ça, j’ai déjà donné cette saison à Lyon. Je ne vois pas l’intérêt de revivre ça. Et je suis lucide : titulaire au PSG, c’est difficile pour moi au vu de ma faible expérience. Ce serait aller trop vite. Le PSG, c’est tout simplement trop tôt pour moi.
Quand la prudence confine au complexe d’infériorité, on voit bien comment un espoir formé à Lyon perçoit le PSG : comme un club dans lequel il sera aussi difficile de s’imposer que chez le septuple champion de France. Rien de moins.
Mais le cas le plus extrême de parisianophilie reste Sidney Govou. Année après année, il balance des pavés pour lesquels on n’aurait pas hésité à tondre Rothen sur la place publique. Par exemple, dans le Parisien, le 19 septembre 2009 :
Le PSG, c’est un club que j’aime bien, sans vraiment pouvoir expliquer pourquoi. Encore plus ces dernières années avec Paul Le Guen, qui est un coach que j’apprécie, et des amis qui ont signé là-bas. Ma carrière n’est pas finie. Je suis bien à Lyon, il me reste une année de contrat, je vais l’honorer et on verra après. Si ça doit se faire [avec Paris], ça se fera, je n’ai pas pour habitude de regretter quoi que ce soit.
On a déjà vu plus discret comme plan drague. Mais le pire, c’est que Sidney est un récidiviste, puisqu’il avait déjà créé l’exploit dans le Parisien du 20 novembre 2008 :
— Aimez-vous jouer au Parc des Princes ? — Moi, j’adore ! C’est la meilleure ambiance de France. C’est terrible.
— Auriez-vous pu jouer à Paris ? — J’aurais bien aimé. C’est compliqué le foot… (rires)
— Cet été, vous étiez proche de porter le maillot du PSG… — Oui, ça ne s’est pas fait, ce n’est pas encore fait… Et peut-être que ça ne se fera jamais. Alors je me suis imaginé jouer avec ce maillot.
— Paris, ça fait toujours rêver ? — Oui, il y a un attrait particulier pour ce club. A chaque début de saison, on a l’impression que le PSG va se relever. On se dit si j’y vais, ça va être la bonne année.
Les auditeurs de RMC vous diraient qu’il faut vivre à 500 km de la capitale pour friser l’extase rien qu’en se rêvant sous les couleurs parisiennes, mais tout de même ! Il faut bien se l’avouer : de haut en bas de leur organigramme, ces Lyonnais nourrissent tout de même un sacré complexe face à la première ville de France.
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