Interview réalisée samedi 23 janvier 2010.
Publication en trois parties :
Première partie : qui est maxifoot.fr ?
Deuxième partie : sa politique éditoriale
Troisième partie : Maxifoot répond aux critiques
Le fonctionnement et les projets de Maxifoot
Maxifoot est alimenté 7 jours sur 7, quasiment 16 heures par jour — de 8 heures à minuit. Comment cela s’organise-t-il ?
Nous avons établi trois créneaux par jour, et un planning hebdomadaire pour assurer un suivi permanent et libérer des plages de repos suffisantes aux journalistes. J’y tiens beaucoup. Ainsi le responsable éditorial du week-end se libère le dimanche après-midi, celui qui travaille le week-end est libre le vendredi soir, et nos deux journalistes principaux ne sont de permanence le soir qu’une seule fois par semaine maximum.
Combien de stagiaires employez-vous ?
De moins en moins : il faut les briefer, passer du temps avec eux, assurer le suivi pour qu’ils progressent. Il est préférable de travailler avec des collaborateurs réguliers. Cela étant, je ne ferme pas du tout la porte aux stagiaires. Nous recevons des CVs très régulièrement, et il peut y avoir des opportunités. Pendant la coupe du monde cet été par exemple, il y aura sans doute des besoins pour un ou deux étudiants en école de journalisme prêts à nous donner un coup de main.
Est-il aisé pour un acteur indépendant présent exclusivement sur le web d’obtenir des contacts avec les clubs ?
De plus en plus. Aujourd’hui, les services de presse nous connaissent tous, donc c’est plus simple : ils savent que nous avons une forte audience, cela les intéresse que nous parlions d’eux. Bien sûr ils vont garder leurs exclusivités pour leur propre compte, mais ils nous répondent. J’entends souvent les clubs se plaindre au sujet de la presse, mais il faut bien voir que les clubs jouent un double jeu : ils ont besoin des médias pour exister. Si demain les médias — que ce soit sur le web, la presse papier, la radio ou la télévision — annoncent qu’ils privilégient le rugby au football, les supporters s’y intéresseront moins, et les recettes des clubs chuteront. Les joueurs devront diviser leur salaire par dix…
Avez-vous envisagé une déclinaison dans la presse traditionnelle ?
Non. Il est vrai que sortir en kiosques permet de bénéficier d’une forte crédibilité, mais cela coûte cher et il est assez certain que nous n’arriverions pas à rentabiliser cet investissement. Dans le cadre d’un partenariat pourquoi pas, mais nous restons vraiment focalisés sur le web, notre véritable domaine de compétences.
Maxifoot avait publié un livre en 2002, qui répertoriait les bonnes adresses du web. Envisagez-vous d’autres événements de ce genre ?
Il s’agissait d’un coup médiatique, pour faire passager un message : surfez sur le net pour suivre le football, notamment à l’occasion de la coupe du monde. J’avais démarché Hachette, et nous avions convenu de faire un test. Nous avons eu quelques couvertures dans la presse — notamment Téléfoot et France Football —, mais l’équipe de France s’est fait sortir très rapidement, et le livre n’a plus été mis en valeur dans les réseaux de distribution. Nous avons vendu environ un millier d’exemplaires. C’était une bonne expérience, nous voulions voir ce que cela pouvait donner. Mais nous n’avons pas d’autres projets de ce type, l’édition ne permet pas de gagner sa vie.
Avez-vous été approchés par d’autres acteurs du web sportif ?
Nous avons eu quelques discussions, mais nous n’avons jamais donné suite. Et nous ne sommes toujours pas vendeurs à l’heure actuelle ! (rires)
Maxifoot face à la critique
Qu’est-ce qui explique l’attention particulière que vous portez au PSG et à l’OM ?
La raison principale, c’est que nous devons proposer un contenu qui intéresse la majorité des lecteurs. Or si nous consacrons plusieurs articles à des clubs moins médiatiques, nous perdons la majorité d’entre eux. Par ailleurs, l’actualité des principaux clubs — PSG, Marseille, Bordeaux, Lyon — est beaucoup plus riche dans les médias français. Il y a donc moins de matière pour faire un article ou une brève sur Le Mans, Le Havre ou Strasbourg, tout simplement parce qu’il y a moins d’informations qui circulent sur ces clubs-là…
« La majorité des internautes souhaitent être informés mais surtout divertis. »
Les petits clubs offrent moins de matière car vos sources sont essentiellement L’Équipe et le Parisien, non ?
C’est vrai qu’aujourd’hui sur Internet les informations sont principalement en rewriting. On réécrit, on retravaille sous un angle qui plaît, qui intéresse notre public. On va souligner ou accentuer peut-être deux ou trois éléments dans une interview ou une conférence de presse, et un autre média va packager son info d’une autre matière. 90 % du contenu provient des médias ou de communiqués de presse. Après, comme tout un chacun, nous avons également nos propres sources, via nos contacts privilégiés avec des clubs, des joueurs ou des agents, pour faire des interviews et alimenter le site avec des infos en exclusivité.
Cette surexposition du PSG et de l’OM ne vous est-elle pas reprochée ?
Certains lecteurs nous reprochent effectivement de ne pas parler suffisamment des petits clubs, mais 34 % des lecteurs que nous avons interrogés dans notre enquête disent s’intéresser principalement à l’actualité de Marseille, et 26 % au PSG. Même Lyon (12 %) et Bordeaux (6 %) n’obtiennent pas des scores extraordinaires — Bordeaux a dû progresser depuis, l’enquête date de mars-avril 2009. C’est peut-être aussi parce que nous suivons correctement ces clubs-là que leurs supporters s’y retrouvent et nous sont plus fidèles que les autres, mais je pense que cela correspond vraiment à l’intérêt des passionnés de foot en général. Les statistiques de consultation reflètent également cet intérêt pour les articles parlant de Marseille et Paris. Une anecdote : il y a quelques jours, dans l’encart qui présente automatiquement les brèves les plus consultées, il y avait 8 news de l’OM sur 8 ! Ce sont celles qui ont eu le plus de trafic, alors que nous avions publié plusieurs dizaines de brèves sur d’autres clubs le même jour. Un autre exemple : notre record de consultation pour une brève remonte aux rumeurs qui envoyaient Ben Arfa à Marseille il y a un an et demi : plus de 110 000 vues ! Et il n’y a pas de miracle : de tous les sites officiels de clubs français, celui de l’OM est le plus visité, loin devant ceux du PSG et de l’OL.
Vous relayez beaucoup de rumeurs de transferts. Cela ne nuit-il pas à votre crédibilité ?
Je pense que certains sites en font plus que nous. Cela étant, c’est vrai que nous en faisons sans doute un peu plus que la moyenne. Nous nous basons sur des chiffres d’audience, et il se trouve que ces brèves-là intéressent beaucoup, donc nous continuons à en produire. Maintenant, nous faisons tout de même un tri non négligeable, et nous prenons un certain nombre de précautions. Par exemple, nous orientons davantage les rumeurs sur « tel club a un intérêt pour untel ». Il faut éviter ce que faisait le journal But ! : « untel vers tel club ? ». Si les chances de concrétisation sont inférieures à 10 %, il vaut mieux dire simplement qu’il y a un intérêt. Par ailleurs, nous précisons assez régulièrement dans le contenu « information à prendre avec des pincettes » ou « pour l’instant, il n’y a rien de fait ». Nous le disons clairement.
Nous avons relevé une multiplication de titres copiant le nouveau style de L’Équipe : « Brandao, c’est quoi le problème ? » ; « PSG, c’est quand la crise ? » Pourquoi un tel nivellement par le bas ?
Ce que la plupart des internautes attendent, en allant sur un site de sport, c’est de pouvoir s’informer mais surtout de se divertir. En sortant du boulot, on n’a pas forcément envie de se prendre la tête sur le football, de philosopher sur ce qu’untel a dit ou de faire une analyse très pointue… La majorité souhaitent être informés mais surtout divertis, il faut répondre à ces deux points essentiels.
« Un journaliste qui passe une demi-journée sur un article, ce n’est pas rentable. »
Pourquoi, à côté des brèves qui vous assurent une audience confortable, ne tentez-vous pas d’articles plus approfondis, de reportages ou d’interviews ?
On ne peut pas être trop différents, sinon on devient trop « élitistes » et le public ne suit pas forcément. Or faire un papier bien documenté et très approfondi nécessite, outre un suivi actif du sujet, plusieurs heures. Aujourd’hui, payer un journaliste pour qu’il passe sa journée à écrire un seul article, ce n’est pas rentable. Il faut donc faire des choix.
Il y a un autre niveau de lecture que la rentabilité directe : vous y gagneriez une meilleure image. Les brèves étant globalement les mêmes sur tous les sites, je serais plus incité à venir les lire sur Maxifoot si je savais qu’il y aura également un article plus fouillé qui m’intéressera.
Je suis d’accord, ce genre de contenus n’est pas rentable directement, mais il peut l’être en regardant les choses dans une globalité : on nous considère de meilleure qualité, d’autres sites peuvent reprendre et citer Maxifoot, ce qui assoit également notre crédibilité. Mais attention, contrairement à la presse papier, sur Internet, les lecteurs zappent et passent très vite à autre chose, les articles courts sont donc à privilégier.
Par ailleurs, l’objet de la presse est bien d’informer avant tout. Si un journaliste trompe ses lecteurs parce qu’il a dû écrire vite et qu’il n’a pas eu le temps de s’informer suffisamment lui-même…
(Il coupe.) On perd de la crédibilité, c’est sûr. C’est un juste milieu à trouver, il faut arriver à dire des choses vraies, crédibles, intéressantes, sans non plus que le journaliste doive passer une demi-journée pour faire son papier, sinon ce n’est pas rentable. Mais je suis d’accord, c’est bien pour cela que nous développons des relations avec des correspondants locaux, qui connaissent parfaitement un club particulier et apportent — plus rapidement — une véritable valeur ajoutée au contenu du site. Nous essayons de faire au mieux en fonction de nos compétences et de nos moyens. (sourires)
Football sur le web et presse sportive
Quand les sites d’information sur le football se mettront-ils à placer des liens vers les sources dans leurs articles ?
En général, il y a un peu d’hypocrisie sur la citation des sources. On le fait parce qu’il faut le faire — et nous y tenons fortement —, mais on n’est pas là pour leur faire de la pub. C’est pareil pour tout le monde. Et puis cela n’empêche pas l’internaute de rechercher la source primaire…
C’est tout de même beaucoup plus pénible ! Les raisons sont évidentes, mais pensez-vous réellement que vous vous feriez du tort en mettant quelques liens directs vers des articles sur leparisien.fr ou lequipe.fr ? Les sites de 20minutes.fr et lepost.fr le font par exemple…
Non, effectivement, je ne pense pas qu’on se ferait du mal. C’est quelque chose auquel nous allons réfléchir, pourquoi pas.
« L’information “football” sur le web ? Le plus gros est fait aujourd’hui. »
Quel regard portez-vous sur l’observation critique du journalisme sportif des Cahiers du Football, dont s’inspire PSGMAG.NET ?
C’est un travail de fourmi, un travail de fond, de tout décortiquer. Je trouve cela super intéressant. Il existe une niche de gens intéressés par ce domaine-là et qui vont prendre plus de temps, être plus dans la réflexion et l’analyse en profondeur, moins dans le direct. Vous aurez toujours un public, mais je pense que c’est tout de même assez restreint. Les Cahiers ont réussi à fédérer ce public. Nous, nous sommes grand public — et encore, pas assez. Par ailleurs, nous ne sommes pas capables de faire ce genre de choses, c’est un autre métier. Nous pourrions peut-être essayer de le faire à notre façon, par le biais d’une rubrique ou d’une chronique hebdomadaire, mais ce n’est pas notre cœur de métier.
Que pensez-vous du traitement réservé au football sur le web en général ?
Je me mets à la place du passionné de foot, il y a quand même un choix suffisamment large pour satisfaire une grande partie du public, avec les sites sportifs généralistes, les sites spécialisés (football.fr, footmercato.net, etc.), les sites officiels, les sites indépendants… Il y a des niches comme les Cahiers, So Foot, ou les Dessous du sport, et il y aura toujours quelque chose à faire mieux pour satisfaire un autre public, mais je pense que le plus gros est fait aujourd’hui.
À quels changements vous attendez-vous pour le secteur de l’information football sur le web d’ici cinq ans ?
Je pense que la vidéo sera davantage intégrée par la plupart des acteurs. Aujourd’hui cela coûte cher, et ce n’est pas rentable. Pour des médias sportifs, l’audience actuellement générée par ce contenu vidéo doit être inférieure à 4 % de l’audience totale du site. Quand tu veux être informé vite, il n’y a rien de mieux que le format écrit. Encore plus si tu consultes les sites sportifs au boulot entre deux réunions. (rires) Le modèle économique de la vidéo n’est pas mûr. Mais c’est l’avenir, c’est sûr… Et il faudra être attentif à la consultation de l’information sur les téléphones mobiles, qui continue à croître.
Justement, n’avez-vous pas peur de vous faire écraser par les poids lourds qui auront les moyens de se permettre ce genre d’investissements ?
D’ici là, il peut se passer plein de choses. (sourires)
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