Le premier trophée « ça arrive partout, dans tous les clubs, tous les ans, mais on n’en parle qu’au PSG donc ça n’arrive qu’au PSG (et du coup c’est drôle, rions-en) » de la saison 2009/2010 est attribué à So Foot pour sa série « les primes au PSG ».
Même quand L’Équipe se trompe, L’Équipe a raison
Tout commence jeudi 6 août : dans L’Équipe, Damien Degorre et Jérôme Touboul évoquent une réunion entre le futur président du PSG et cinq joueurs à propos des primes :
Les Parisiens discutent les primes
Les joueurs cadres du vestiaire ont rencontré, hier, Robin Leproux, au Parc des Princes. Claude Makelele, le capitaine du PSG, accompagné de Sylvain Armand, Sammy Traoré, Zoumana Camara et Grégory Coupet pour discuter avec le nouveau conseiller de Sébastien Bazin, qui sera officiellement nommé à la présidence du club parisien début septembre. L’objet de cet échange concernait les primes de résultats sur la saison à venir. Aucun accord n’en est encore ressorti. La saison dernière, les primes de victoire s’élevaient à 3000 € par joueur. En cas de titre de champion, une enveloppe globale de 4,5 M€ était initialement prévue. En cas de deuxième ou troisième place, l’effectif du PSG se serait partagé un bonus compris entre 3 M€ et 3,5 M€.
Le lendemain, les duettistes du quotidien sportif reviennent à nouveau sur cette réunion [1] :
Alors que la veille on apprenait qu’« aucun accord n’est encore ressorti » de la réunion de mercredi, voilà finalement qu’« un accord se serait esquissé ». Camara et Coupet, qui « ont rencontré Robin Leproux » d’après l’article de jeudi, n’étaient finalement pas là d’après celui de vendredi. Les deux évoquent pourtant la même réunion… Obligés de se contredire dès le lendemain, Touboul et Degorre parviennent tout de même à éviter les « rectificatif », « erratum » et autres mentions désagréables. Mieux, ils parviennent à en référer à leur article de la veille, alors qu’il s’agit bien d’un doublon faute d’avoir recueilli et recoupé des informations fiables la veille.
Bilan : deux brèves en deux jours sur les primes du PSG, et uniquement celles du PSG. Touboul et Degorre sont-ils meilleurs journalistes que leurs collègues marseillais, lyonnais ou bordelais ? Les autres clubs savent-ils mieux garder leurs secrets ? Une chose est sûre, s’il ne se passe rien au PSG, vous le saurez quand même en lisant L’Équipe. Quant à ce qui se passe à Lorient ou Nancy, rien n’est moins sûr…
Mais alors pourquoi évoquer sur ces pages ce non-événement que constitue la négociation des primes en début de saison ? Tout simplement parce que d’autres journalistes en profitent pour faire preuve d’une paresse intellectuelle bien trop habituelle à notre goût.
Les chasseurs de scoops de So Foot
Le 7 août, le dénommé « BB » recopie la brève de L’Équipe sur sofoot.com :
Les chasseurs de primes du PSG
Au Camp des Loges, on n’est pas passé bien loin d’un nouveau drame : les primes de match n’étaient pas fixées. On imagine déjà le scandale.
Le tir a été rectifié hier par Robin Leproux, qui a rencontré le « syndicat » des joueurs du PSG, comprenez les représentants-leaders du groupe, composé d’Armand, Makelele et Traoré. Les bons gros salaires du club en somme. Et ces bonnes gens, soucieux des intérêts des travailleurs, ont négocié comme il se doit des primes de matchs pour ceux qui vont au charbon tous les week-ends…
En tout cas, ils ont fait les choses simplement : 1 000 euros le point. Une victoire rapportera donc 3 000 euros à chaque joueur. Ce qui veut dire aussi qu’un nul au Parc face à Valenciennes ou Grenoble sera récompensé de 1 000 euros…
En même temps, soyons réalistes : ça ne fera pas marquer plus de buts à Kezman. Parce qu’avec un salaire de l’ordre de 250 000 euros, pas sûr qu’un pourboire fasse la différence…
Contrairement à ses confrères du web, So Foot n’oublie pas de faire preuve d’un peu d’ironie en recopiant la presse traditionnelle. Mais à part ça, on cherche toujours la pertinence de cet article. « Les chasseurs de primes du PSG » ? Il n’y aurait donc qu’à Paris que des types payés 100 fois le Smic négocient des primes de résultat. Inculture crasse ou simple incapacité à prendre du recul ? [2]
Quoi qu’il en soit, « BB » ne s’arrête pas en si bon chemin. Quelques heures plus tard, dans une brève évoquant la demande faite par un syndicat de policiers allemand auprès de la Fédération d’une redevance pour la sécurité assurée autour des stades, « BB » ne trouve rien de mieux que de parler… du PSG. Et c’est reparti pour un tour :
Des millions pour les flics allemands ?
Il n’y a pas que les joueurs du PSG pour exiger un petit supplément financier à la veille de la saison. La preuve, les policiers allemands s’y mettent aussi.
C’est bien beau l’ordre et la sécurité dans les stades, mais ça risque de coûter cher, surtout à la Fédération allemande. Le DPolG – un des syndicats de la police allemande – exige une redevance de 75 millions d’euros par an pour continuer à assurer la sécurité, à l’intérieur et à l’extérieur des stades.
La controverse pourrait toutefois vite devenir un sujet de débat public. Car le syndicat révèle comment les charges sont pour l’heure financées par les instances footballistiques : le responsable syndical, Rainer Wendt, explique que les 1,4 million d’heures de travail générées pour ces exercices de sécurité sont majoritairement « supportés par les contribuables. Si les clubs peuvent encore payer des salaires aussi élevés, c’est parce qu’ils se déchargent d’une partie non-négligeable de leurs frais de fonctionnement sur les contribuables ».
Le plus simple, ce serait encore qu’il n’y ait pas besoin de police dans les stades, mais bon…
Et voilà comment alimenter, de manière anecdotique mais quotidienne, l’idée reçue selon laquelle il se passe toujours des choses extraordinaires à Paris — ce club bling-bling de stars surpayées —, et qui n’arrivent pas ailleurs.