Un supporter historique issu du Kop of Boulogne, un autre du Virage Auteuil, et Jérémy Laroche — président de l’association Liberté pour les Abonnés — nous livrent leur vision des derniers événements ayant secoué les tribunes du PSG. Interrogés séparément, les deux anciens membres d’associations et Jérémy Laroche parlent de la médiation, des matches du PSG auxquels ils ont pu assister en province, et de la façon dont ils ont vécu les réactions du président Leproux après ces événements.
La médiation, source de défiance
Le supporter du Virage Auteuil nous raconte pourquoi la médiation n’a finalement rien arrangé :
Lors de la médiation, nous avons fini par développer la certitude que Leproux nous a fait des propositions en sachant très bien qu’on ne pouvait pas les accepter : nous avions été reçus par messieurs Cayzac et Borotra, nous leur avions adressé nos propositions pour faire avancer le débat : ce que nous voulions, mais aussi et surtout ce que nous ne pouvions en aucun cas accepter. Et que retrouve-t-on dans le discours de Leproux ? La liste exacte de tout ce dont nous ne voulions pas !
Ce sentiment d’un manque d’écoute, ou pire, on le retrouve aussi chez le supporter du Kop of Boulogne :
Leproux ne prend jamais en compte l’avis des supporters : il n’écoute que les people ! Mais surtout, il est incapable de changer de position quand il en a adopté une. Il ne fait aucun effort et se contente de repousser en bloc toutes les idées qui ne sont pas les siennes sans même les écouter.
Pourtant, d’après cet ancien du Kob, il y avait des propositions que le PSG aurait dû prendre en compte :
Certains proposaient qu’il continue son plan Tous PSG en virages rouges, mais en réservant les niveaux bleu à l’ensemble des anciens abonnés en non aléatoire. Mais Robin Leproux est borné et n’a pas voulu nous écouter…
Cette impression d’avoir été questionnés en vain, l’ancien du Virage Auteuil l’illustre par un autre exemple :
Cayzac et Borotra nous ont écoutés, mais le jour de la réunion le bilan qu’ils en ont dressé dans leurs discours montraient qu’ils n’avaient rien pris en compte ! Ils auraient pu tenir les mêmes propos sans nous avoir rencontrés. C’était vraiment décevant. Leproux a ensuite énoncé son plan en une dizaine de minutes. Nous sommes tombés des nues : on nous avait floués. Tout de suite, ça a gueulé. Mais il n’y avait plus de dialogue, ces échanges étaient improductifs. Le président nous a dit qu’il avait rendez-vous avec les médias et il est parti, excédé. Quelque part c’était très insultant.
Le président du PSG a-t-il commis une erreur en quittant cette réunion aussi vite ? L’avis du supporter issu du Kob apporte une idée de réponse :
Son apport lors de la médiation s’est limité à un monologue de 10 minutes avant de nous planter pour aller recevoir les journalistes. C’est un non-respect total.
Au-delà de ce départ précipité, le supporter d’Auteuil évoque un autre problème :
Lors de cette entrevue, Franck Borotra a expliqué que tous les supporters d’Auteuil et de Boulogne se détestaient, qu’ils ne pouvaient absolument pas vivre en bonne intelligence. Ce genre de propos sont dramatiques : ils sont basés sur la peur et la méconnaissance, mais surtout ils contribuent à renforcer des clichés. Ils entretiennent la crainte et le rejet de l’autre. C’est à la fois contre-productif et très grave. Je ne sais pas si Robin Leproux croit à cette thèse. J’ai passé la médiation à me demander s’il était convaincu des clichés qu’on nous débitait ou s’il nous prenait pour des idiots… et je n’ai pas de réponse.
Mais surtout, la réaction du président du PSG a soulevé plusieurs remarques chez l’ancien du Virage :
À la fin, Leproux était méconnaissable. Je crois qu’il est venu en sachant que ça ne pouvait pas bien se passer, et il n’a pas supporté la pression. Désormais, il prend tout pour lui, ne supporte plus rien. Il était tellement énervé, c’en était troublant. Comme s’il n’assumait plus qu’il ce qu’il faisait.
Les déplacements
Plusieurs déplacements de supporters ont été source de tensions : Parisiens empêchés de rentrer dans les stades sans qu’ils n’aient rien à se reprocher, policiers ordonnant que l’on retire les bâches, rumeurs selon lesquelles des dirigeants du PSG alerteraient leurs homologues que des hooligans tenteraient d’investir leurs tribunes…
L’ancien membre d’une association du Virage Auteuil raconte le déplacement à Lorient :
À Lorient, après être rentrés sans montrer de signe de notre appartenance au PSG, nous nous sommes tous levés au coup d’envoi avant de commencer à chanter. Nous avons rassuré les policiers et les stewards bretons. Mais quelques minutes plus tard, bien qu’il n’y ait aucun problème avec les supporters locaux, les forces de l’ordre nous ont demandé de retirer notre bâche « Colony Go Home ». Nous leur avons demandé pourquoi et ils nous ont répondu que c’était « le PSG qui [leur] avait ordonné de la faire retirer ». Depuis quand notre club donne-t-il des ordres à la police ?
D’autres déplacements ont nourri ce sentiment de rejet des supporters :
Les déclarations de Robin Leproux sont contradictoires : il nous dit que le Kob et le VA sont incapables de se mélanger, qu’il voudrait que l’on puisse aller au stade dans la même tribune. On organise un déplacement à Valenciennes, tous dans la même tribune. Là, il n’y a aucun incident à déplorer, ni entre supporters du PSG ni avec les locaux avec lesquels nous étions mélangés, et après il explique qu’il ne faut plus qu’une telle chose se reproduise ?
La défiance s’installe donc lors de chacun de ces incidents. Robin Leproux met-il ouvertement la pression pour que ces supporters ne puissent plus se déplacer ? Sur une autre rencontre, à Valenciennes cette fois-ci, le témoignage de Jérémy Laroche éclaire celui de l’ancien d’Auteuil d’une lumière troublante :
De ce qu’il m’a dit, lors du match à Valenciennes Robin Leproux est allé voir le délégué de la LFP pour lui demander comment des supporters du PSG avaient pu rentrer en tribunes autres que la tribune visiteurs. Il ne comprenait pas pourquoi la préfecture n’avait pas pris davantage de mesures.
Alors, la police aux ordres du PSG ? Pas si simple que cela, même à écouter Jérémy Laroche :
Robien Leproux m’a affirmé que les pouvoirs publics avaient vécu la venue des Parisiens à Valenciennes comme un échec, vu que les regroupements de supporters du PSG étaient interdits. Les pouvoirs publics lui auraient indiqué que c’était la dernière fois qu’une telle chose se produisait. On se demande bien au nom de quoi : il n’y a eu aucune infraction !
Impossible donc de déterminer qui du PSG ou du ministère de l’intérieur est le principal instigateur du climat de suspicion sculpté match après match. Seule certitude : le malaise semble profond. Et les ressentiments quasi définitifs.
Robin Leproux reste-t-il l’homme de la situation ?
Si Alain Cayzac estimait que seuls le temps et le dialogue pouvaient sortir le PSG de cette ornière, encore faut-il que les acteurs de la crise puissent se parler. Et à écouter l’ancien du Kop, rien n’est moins sûr…
Nous avons désormais l’impression que Leproux mène un combat personnel. Et il commet l’erreur de le mener sans faire de concertation. Nous ne voulons plus discuter avec lui car pour nous, il n’a pas de parole, et fait le contraire de ce qu’il nous avait promis dès que nous avons le dos tourné. C’est un homme faux, qui se sent investi d’une mission qui le dépasse.
Des propos qui trouvent un écho ironique chez Jérémy Laroche :
Bien sûr que l’on peut toujours discuter avec Leproux… sauf que cela ne sert à rien ! À partir du moment où on ne va pas dans son sens, il ne tient aucun compte de ce qu’on lui dit ! Ce n’est donc pas un interlocuteur valable.
Le supporter historique du Kop of Boulogne considère par ailleurs que la contestation ne fait que commencer :
Leproux n’est pas l’homme de la situation. Désormais, c’est un problème de personnes : on ne peut plus avoir affaire avec quelqu’un qui de toutes manières ne veut plus avoir affaire avec nous ! Il s’accroche aux louanges de ceux qui le suivent aujourd’hui. Mais les interdictions de stade prononcées cet été ne seront pas prolongées, les contestataires seront donc de plus en plus nombreux dans les jours à venir, et surtout de plus en plus actifs…
Les supporters peuvent-ils encore espérer quelque chose d’une discussion avec le président du PSG ? Pour l’ancien membre d’association du Virage Auteuil, la réponse est claire :
Une chose est sûre : Leproux est obtus et quand il a une idée en tête, il ne change plus d’avis. On a parfois l’impression d’avoir devant nous un chevalier qui poursuit une quête. Cela rend le dialogue impossible. En agissant comme il le fait, il pousse à bout ses interlocuteurs. Nous sommes convaincus qu’il ne veut plus des ex-membres d’associations, c’est tout.
Un avis partagé par Jérémy Laroche :
Il agit comme s’il n’avait qu’un but : qu’il n’y ait plus au PSG de contre-pouvoir.
synthèse de nos entretiens avec les supporters
Robin Leproux répond à nos questions (1/2)