« On est capable d’avoir une vraie réaction du public. J’ai même entendu des départs de chants », s’est réjoui Robin Leproux après le match PSG-Rome. Nous avons recueilli le témoignage de l’un de ceux qui ont tenté de lancer quelques chants.
Je m’appelle Laurent Bylka, j’ai 30 ans. Je vis en couple depuis 11 ans, j’ai quatre enfants — un garçon et trois filles —, je suis cariste. Je suis un habitué de la tribune Auteuil depuis de nombreuses années. L’année dernière j’étais abonné en tribune G, carté chez les Authentiks.
« Leproux envoie les Portugais à Boulogne ! »
Samedi, lors du match PSG-Porto, j’étais en tribune Boulogne rouge. Cela s’est plutôt bien passé avec les stewards, qui nous ont laissé chanter debout et semblaient aussi déçus que nous de voir le Parc des Princes dans cet état.
Une vingtaine de supporters portugais ont essayé de bâcher — les stewards comptaient les laisser faire —, mais nous les en avons empêchés car si cela nous était interdit à nous Parisiens, alors il n’était pas normal que des supporters adverses aient le droit de le faire dans notre propre tribune. Ils ont très bien compris notre position. Il s’agissait de supporters venus de Porto, et non de Franciliens d’origine portugaise. Ils nous ont d’ailleurs montré leurs billets : ils avaient en fait des places dans le parcage visiteurs, en tribune F, mais ils nous ont expliqué que c’est le président du PSG qui avait demandé à ce qu’ils soient placés à Boulogne malgré leurs billets ! Que se passera-t-il quand un groupe de supporters adverses plus nombreux fera la même chose ?
En deuxième période, en Boulogne bleu, des chants marseillais ont commencé à se faire entendre. C’était l’œuvre de petits d’une dizaine d’années. Samedi soir, j’étais déjà dégoûté de voir le Parc comme ça, mais dimanche allait être pire…
« Les stewards ont voulu m’exclure du stade »
Votre article sur le match PSG-Roma de dimanche est très exact. Nous étions placés en bas à gauche de la tribune Auteuil rouge. Nous avons sympathisé avec quatre personnes placées derrière nous, et nous avons décidé — après que les stewards nous ont demandé de nous asseoir pour la cinquième fois — de nous déplacer, et nous rapprocher des supporters romains. Quelques connaissances sont venues nous rejoindre, et nous avons commencé à lancer quelques chants. Les joueurs de la Roma sont venus s’échauffer au pied de la tribune, l’ambiance était toujours bon enfant, même si un steward venait nous demander de nous asseoir toutes les deux minutes.
Ensuite les renseignements généraux sont arrivés en haut des escaliers, et les stewards ont commencé à être encore plus pénibles : nous gênions soi-disant des enfants, alors qu’il n’y avait personne derrière nous… Devant leur insistance, nous avons décidé de nous regrouper avec quelques autres Parisiens motivés et de nous placer à un endroit où nous ne pouvions pas gêner qui que ce soit, puisque derrière nous se trouvait un mur. Nous avons continué à chanter debout. Voyant que les stewards continuaient à faire ch… tous ceux qui se tenaient debout, j’ai lancé le chant « tout le monde debout », qui sera suivi par toute la tribune.
Après quelques chants — « Ô Ville Lumière » et « Colo’Nike ta mère » notamment —, les choses se sont gâtées : le responsable des stewards m’a fait signe gentiment de le rejoindre. J’y suis allé tranquillement, tout seul, même si je savais très bien le guet-apens qui m’attendait. Et je n’ai pas été déçu : dès que nous avons descendu l’escalier, son sourire de façade a changé. Après m’avoir isolé dans un coin à l’abri des regards en me serrant le bras le plus fort possible, il a commencé à me menacer en criant. On m’a reproché d’engrener toute la tribune dans une rébellion et d’être le meneur ; les stewards n’appréciaient pas du tout les chants contestataires que nous lancions. Les RG ont alors débarqué avec de nouveaux stewards et un autre supporter qui avait le tort de rester debout et de chanter. Il s’est fait malmener devant les yeux de son père, choqué et totalement impuissant. Une minute plus tard, un autre gars puis mon petit frère nous rejoignent… Après des palpations et un contrôle d’identité par les RG, qui ont relevé nos noms, ceux-ci nous ont dit que nous pouvions retourner en tribune.
Mais il restait encore une bonne dizaine de stewards qui nous parlaient mal et voulaient à tout prix nous jeter dehors. Ils nous ont entourés et nous ont dit qu’il était hors de question que nous retournions en tribune, qu’ils allaient nous jeter dehors de force. Au moment où le ton commence à monter entre nous, des stewards sortent un autre gars des tribunes — cela correspond aux deux photos dans votre article. Lui aussi chantait debout… Il ne voulait pas se laisser faire, nous nous sommes dirigés vers lui et ça a commencé à chauffer avec les stewards. Pendant que la plupart d’entre-eux étaient occupés à faire les coqs, nous sommes revenus sur nos pas, forcés, puis nous sommes repartis en tribunes avec un clin d’œil approbateur des RG — c’est le monde à l’envers —, et nous nous sommes réinstallés au même endroit. Les stewards sont revenus me voir plusieurs fois, et m’ont menacé de me jeter dehors avec pertes et fracas si je me relevais… Ce que j’ai fait.
La suite du mouvement
J’ai des amis à la fois à Auteuil et à Boulogne, car je suis avant tout un supporter du PSG. J’ai mal au cœur en voyant ce que les dirigeants du club font de notre Parc. Leur plan est discriminatoire, honteux et très violent pour tous les amoureux du PSG. Il faut que nous nous battions tous ensemble contre cette punition collective, et je pense qu’au contraire il ne faut pas boycotter le Parc, le leur abandonner, mais bien continuer à lutter de l’intérieur, leur montrer que nous supporters on sera toujours là et que leur dictature ne marchera jamais, car notre ferveur sera toujours plus forte.
Il faut que nous multiplions les manifestations devant nos tribunes pendant les matches, devant la mairie de Paris, sur les Champs-Élysées… Que nous leur montrions que nous sommes tous unis devant leur plan immoral et leurs discriminations envers tous les abonnés des virages et les amoureux du PSG. Qu’à notre tour nous leur mettions la pression, et que nous ne lâchions rien, que ce soit à l’intérieur ou à l’extérieur du stade. Que tout le monde reste debout en tribune, chante son amour pour le Paris Saint-Germain et son mépris envers Colony Capital.
Je serai de retour au Parc des Princes dès samedi contre Saint-Étienne. Le combat continue.