Interview réalisée jeudi 25 février 2010.
Publication en quatre parties :
Première partie : les coulisses du club et le « peuple du PSG »
Deuxième partie : sa présidence en avril-mai 2008
Troisième partie : la démission de Charles Villeneuve, Colony Capital et les maillots
Quatrième partie : l’association PSG, les jeunes et les féminines
La formation et les équipes de jeunes
Administrateur de la société commerciale jusqu’en 2001, Simon Tahar a ensuite rejoint l’association PSG, dont il est devenu vice-président puis président en 2006.
Quelles étaient vos priorités en arrivant à la tête de l’association ?
J’ai souhaité faire un travail sur plusieurs niveaux. Premièrement mettre de l’ordre, parce que nous étions dans une gestion à la bonne franquette qu’il a fallu « professionnaliser ». Deuxièmement donner aux jeunes les moyens de savoir pourquoi ils portent les couleurs du PSG, que signifie le fait de respecter l’arbitrage, de respecter l’équipe adverse, de se tenir d’une certaine manière quand nous jouons à l’extérieur… Enfin troisièmement je tenais à ce qu’il n’y ait pas d’un côté les équipes de l’association et de l’autre les équipes de la section professionnelle. Toutes ces équipes forment le même club, il fallait créer un pont entre les deux. C’était essentiel, car jusqu’à présent tout le monde se regardait comme s’il y avait deux camps qui coexistaient. L’objectif de l’association est de former les jeunes jusqu’à ce qu’ils arrivent à passer à la pré-formation, puis ensuite à la formation. Régulièrement, nous faisons ainsi passer des jeunes de l’association vers la formation, alors que normalement l’essentiel des effectifs viennent de la détection par le centre de formation.
Vous avez également mis l’accent sur la médiatisation des actions de l’association.
J’ai effectivement voulu valoriser nos actions. Par exemple, nous organisons chaque année depuis 28 ans un événement remarquable, le tournoi international catégorie U14 — anciennement tournoi international des moins de 13 ans. Ce sont en fait deux tournois qui se déroulent à la Pentecôte, pendant trois jours : une compétition internationale rassemble les huit meilleures équipes françaises et huit équipes internationales invitées — cette année nous avons notamment le Hertha Berlin et la Fondation Samuel Eto’o. Le niveau est très relevé, un grand nombre de participants sont des futurs professionnels. Nicolas Anelka, Frédéric Kanouté, Vikash Dhorasoo ou encore Sylvain Armand ont participé à ce tournoi quand ils avaient treize ans. Dans les rangs du PSG actuel, Arnaud, Chantôme, Makonda, Maurice, Partouche, Sakho ou Sankharé ont disputé cette compétition. Et en parallèle, un tournoi régional regroupe seize équipes d’Île-de-France. Tous les joueurs du tournoi international sont hébergés par les familles des équipes régionales, cela crée un lien absolument formidable ! Cela permet de favoriser les contacts et de garder des relations. Il était important de mieux valoriser ce tournoi.
« Les résultats des équipes de jeunes sont excellents, les jeunes ont leur chance en pros, mais ils ne sont pas performants avec l’équipe première. Il faut résoudre ce problème. »
Depuis quelques années, l’image du PSG en matière de formation semble s’être améliorée. Les résultats confirment-ils cette impression ?
Le travail de formation que le club a entrepris il y a plusieurs années — notamment sous la direction de Bertrand Reuzeau, qui est un garçon remarquable — est très important. Et les résultats au stade de l’éclosion des talents sont significatifs. Il suffit de voir nos résultats, que ce soit en CFA, dans toutes les équipes de jeunes — nous sommes en tête dans toutes les sections : U14, U15, U17 et U19 — ou même au niveau des équipes de l’association : l’équipe senior est en tête de la DSR, nous jouons la montée en DH. Lorsque nous organisons une séance de détection, nous avons des candidats qui viennent presque du monde entier… Tout cela prouve bien que le travail de formation paye réellement, même si les gens ne s’en rendent pas vraiment compte. Nous faisons tout ce qu’il faut pour porter le plus haut les couleurs du club.
De nombreux joueurs ont signé un premier contrat pro au PSG récemment, mais peu réussissent à franchir le pas et à s’imposer en équipe première…
Nous avons des résultats concernant le nombre de signatures de premier contrat professionnel. Il y a également eu un effort de la part des entraîneurs de l’équipe première, qui ont fait confiance à ces jeunes joueurs. Là où le bât blesse, c’est au niveau de leurs performances avec l’équipe première. Il faut vraiment que nous engagions une réflexion à ce sujet, parce qu’il n’y a pas de raison que ces joueurs, issus d’un processus remarquable et efficace — Sakho est rentré au club à 13 ans par exemple —, butent au moment où ils rentrent réellement dans la carrière. Quelque chose ne fonctionne pas, il faut identifier les raisons qui font que les joueurs ne sont pas en confiance. On leur donne l’occasion de jouer, alors qu’il y a quelques années ce n’était pas envisageable — à l’époque de Luis Fernandez ou d’Artur Jorge il n’y avait aucune chance pour qu’un jeune puisse débuter en pros —, mais ils ne sont pas performants. Ce n’est pas un manque de qualité, ces joueurs sont tous internationaux. Il y a un problème que nous devons résoudre.
Le blocage se situerait au niveau du secteur professionnel, qui n’arriverait pas à intégrer ces joueurs ?
Je pense qu’il y a un travail à faire dans l’accompagnement des joueurs lorsqu’ils rejoignent le groupe pro, pour qu’ils se sentent un peu plus en confiance, qu’ils ne se démoralisent pas à la première déconvenue. C’est très difficile de rentrer au Parc à son premier match, bien plus que de rentrer à Auxerre ou à Lorient où il y a une culture pour cela, cela semble naturel qu’un jeune puisse y faire ses premiers matches en pro. À Paris, ce n’était pas le cas jusqu’à présent.
Que pensez-vous du départ de certains joueurs que le club souhaitait conserver, comme Chris Mavinga ?
Il y aura toujours des incidents, c’est évident. Nous ne pouvons pas maîtriser à 100 % le parcours intérieur d’un jeune un peu isolé, qui se pose des questions, surtout qu’il y a une génération entière à gérer.
Avec du recul, il nous semble que les difficultés du PSG en matière de formation sont dues en partie à l’inertie du club dans ce domaine durant les années 1990, qui s’est contenté de faire briller l’équipe première au moment où il aurait fallu poser les bases d’une politique à long terme. Partagez-vous ce constat ?
Je pense que nous avons été confrontés à deux problèmes : à un moment où le PSG n’était pas encore organisé au niveau de la formation, des clubs qui l’étaient déjà sont venus piller le réservoir de la région francilienne — dans laquelle tout le monde puise, d’Auxerre à Lyon en passant par Sochaux ou Rennes. Mais aujourd’hui je pense que nous avons réalisé des efforts importants, et je suis tout à fait confiant que dans les années à venir des grands joueurs vont sortir.
Les féminines du PSG et le volet social
L’association PSG est en charge de toutes les équipes féminines, pour lesquelles Simon Tahar a initié un projet ambitieux sur trois ans.
« J’ai bâti un projet sur trois ans pour l’équipe féminine, qui doit nous amener à disputer la coupe d’Europe d’ici là. »
Cette saison, le club semble faire beaucoup d’efforts pour avoir une équipe féminine performante. Pourquoi une telle démarche ?
Notre équipe première se traînait régulièrement dans le ventre mou de la D1. J’ai pensé que soit nous arrêtions — cela ne m’intéresse pas que les équipes du PSG soient en milieu de tableau, pour moi elles doivent être en tête, tout le temps —, soit nous essayions de construire un projet sérieux. Donc j’ai bâti l’année dernière un projet sur trois ans, avec un manager général qui est une ancienne internationale capée une quarantaine de fois, Brigitte Olive, et autour d’elle un staff absolument remarquable sur le plan technique. Nous avons ainsi créé une véritable section féminine, partant de l’idée que nous devions arriver aux deux premières places d’ici trois ans, afin de jouer la coupe d’Europe. En France, on ne sait pas ce que c’est le football féminin, mais en Allemagne, en Angleterre, au Danemark, en Norvège, aux États-Unis ou au Brésil, c’est quelque chose d’exceptionnel, et il y a des compétitions européennes très importantes.
Quels sont les résultats après une demi-saison ?
Nous avons monté une équipe sur la base des joueuses que nous avions, et nous avons procédé à quelques renforts judicieux, comme par exemple les prêts de Camille Abily et Sonia Bompastor en provenance de deux clubs américains, Washington et Los Angeles, parce que les saisons sont décalées par rapport aux États-Unis. Elles ont été formidables, très professionnelles et très disponibles. Ces efforts portent leurs fruits : le PSG est actuellement premier, toujours invaincu, et n’a encaissé qu’un seul but en 13 journées ! Maintenant, il faut réussir la fin de la saison.
Cette initiative a plu, je veux lui rendre hommage, à Sébastien Bazin, que j’ai convaincu puisqu’il nous a aidés à augmenter la subvention que le PSG accorde à l’association afin de pouvoir monter en puissance. Je l’ai également convaincu d’exposer un peu plus cette équipe : nous avons effectué l’opération Parc des Princes [1] — il y en aura d’autres —, le site officiel parle régulièrement de l’équipe féminine, PSG TV également… C’est quelque chose de très important pour l’image du club. Il faut montrer que nous avons des forces. J’ai vu cette banderole contre Toulouse : « U15, U17, U19, féminines : tous en tête ». Mon travail, c’est cela : mettre en valeur tout ce qui peut alimenter le crédit du club. Et il y a une vraie aventure qui peut se développer autour du football féminin.
« Si l’on regarde les fondamentaux, il existe vraiment peu de clubs comme le PSG. »
Quelles actions mène l’association dans le domaine social ?
Nous avons des conventions avec la Licra et avec le Paris Foot Gay pour lutter contre les discriminations. Nous menons également des actions à travers la Fondation PSG : nous projetons des choses absolument formidables au niveau des quartiers en difficulté, des jeunes laissés sur le bord de la route, des malades… Nous essayons d’apporter du réconfort et de leur proposer des stages. Malheureusement, toutes ces initiatives sont des choses dont le public n’est pas instruit, parce que cela n’intéresse pas la presse. Ce qui l’intéresse c’est essentiellement de savoir qui va jouer dimanche et pourquoi tel joueur n’a pas été recruté. (sourires) Je caricature évidemment, mais je peux vous assurer que, si l’on regarde les fondamentaux, il existe vraiment peu de clubs comme le PSG, à tous points de vue.
Première partie : les coulisses du club et le « peuple du PSG »
Deuxième partie : sa présidence en avril-mai 2008
Troisième partie : la démission de Charles Villeneuve, Colony Capital et les maillots
Quatrième partie : l’association PSG, les jeunes et les féminines