En guise d’analyse de la rencontre, le dénommé Barry Lyndon nous propose un texte focalisé sur les lacunes parisiennes [1], dans un match qui n’a pas été loin d’être le plus abouti de ces derniers mois… La ligne directrice est d’emblée discutable.
On se demande à quel moment les intentions de Kombouaré furent de bétonner au milieu ? Celui-ci a aligné un milieu à quatre, dont deux créateurs, avec deux attaquants en pointe. On est loin d’une formation venue se recroqueviller devant son but et jouer les contres. Même Laurent Blanc l’a reconnu : « Paris a pris énormément de risques, cela nous change un petit peu de certaines habitudes. On a vu un match très ouvert. J’ai pris beaucoup de plaisir à le regarder. » De la même manière, parler d’un début de rencontre timoré des Parisiens nous permet juste de penser que le rédacteur s’est contenté d’un résumé de Jour de Foot pour dresser une analyse d’un match complet : Paris a été dominé durant les deux premières minutes et a ensuite pris la main sur la rencontre. Sans se montrer dangereux certes, il n’empêche que c’est à un moment où ne s’y attendait pas que Bordeaux a ouvert le score, quasiment contre le cours du jeu.
Armand et la faute de marquage hors de sa zone
Ensuite, Lyndon décortique l’action du but de façon pour le moins grotesque. La preuve : Pierre Ménès pense la même chose que lui [2].
Sans décrypter à nouveau l’action, rappelons simplement que l’on peut dédouaner Sylvain Armand de la responsabilité de ce but encaissé : accuser un arrière gauche sur une tête effectuée entre les défenseurs axiaux, après un centre venant de la droite, paraît tout de même être hors de propos. Armand est allé disputer un duel hors de sa zone, puisque ses coéquipiers ne le faisaient pas. Il aurait pu rester à son poste, ne pas prendre de risque, et il n’aurait eu aucun mauvais commentaire dans la presse. La morale est donc toujours la même : mieux vaut ne rien tenter, et personne ne parlera de vous en mal…
Quant au fait qu’Armand recadre ses troupes, cela ne présente absolument rien de choquant. L’arrière gauche parisien a certes commis plusieurs erreurs depuis le début de saison — et il en a d’ailleurs parfois assumé la responsabilité publiquement [3] —, mais quel rapport avec l’analyse du but encaissé à Bordeaux ? Si seuls ceux qui ne commettent aucune erreur avaient le droit de parler tactique à leurs coéquipiers, aucun joueur ne hausserait le ton, au PSG comme ailleurs. Il est évident que la défense parisienne toute entière est passée au travers sur cette action. Qu’Armand ou un autre pousse une gueulante semble au contraire être une attitude des plus saines et constructives.
Quant à la saillie sur le niveau d’Armand, elle tombe plutôt mal au moment où celui-ci vient d’enchaîner ses meilleurs matches de la saison, contre Auxerre et Boulogne — même L’Équipe et le Parisien, pas tendres avec l’ancien Nantais en début de saison, l’ont souligné.
Mais Lyndon ne s’arrête pas là dans sa diatribe envers Armand en surinterprétant un fait de jeu des plus bénins :
Ce passage est très intéressant car il relève le problème général d’image auquel fait face le PSG depuis quelques années. Cela mériterait sûrement un développement plus complet, mais il est quand même très troublant de voir que dorénavant, le fait de faire jouer des jeunes du centre de formation est une preuve d’absence de profondeur de banc. D’autant plus troublant qu’auparavant, le même PSG était brocardé lorsqu’il était incapable de se servir de l’incroyable vivier qu’est l’Île-de-France pour former de jeunes footballeurs. Si l’on trouve inacceptable qu’avec trois attaquants sur la touche — Hoarau, Erding et Giuly — un jeune du club rentre sur le terrain, alors il faut que le PSG arrête tout de suite de perdre des sous en faisant fonctionner son centre de formation.
Mais cette attaque est d’autant plus troublante que Maurice a fait une bonne rentrée — ce que l’auteur reconnaît lui-même, prouvant par là-même le peu de cohérence dans ses propos — et que les Girondins ont eux-mêmes pallié la blessure de leur milieu gauche Wendel en titularisant un jeune du cru inexpérimenté, Sertic. Cela signifie-t-il pour autant que les Bordelais ont un banc famélique ?
Les milieux défensifs qui jouent sur les côtés
Mais le clou de l’article vient ensuite. Jusque-là, il y avait une part de subjectivité dans une telle analyse, et qu’il y ait des divergences de point de vue n’est pas choquant en soi. En revanche, ce qui suit prouve que le rédacteur de So Foot n’est pas capable de comprendre ce qu’il se passe sur un terrain.
C’est officiel, Barry Lyndon n’a pas vu le match dont il parle. D’une, Bordeaux n’a jamais remis le pied sur le ballon en seconde période, ils n’ont procédé qu’en contres — cela nous conforte dans l’idée que cette analyse a été dressée uniquement à partir d’un résumé télé. De deux, l’attaque envers Kombouaré se base sur des propos complètement erronés : Sankharé et Jallet ont effectivement remplacé Clément et Makelele, mais ce n’était pas du tout du poste pour poste. Sankharé est venu se positionner couloir gauche, Jallet dans le couloir droit, et la paire de récupérateurs était Sessegnon/Chantôme, qui est par définition bien plus offensive que la paire alignée initialement. Kombouaré a pris le risque de jouer sans milieu défensif de métier, ce qui s’apparente à un choix offensif : empiler les attaquants n’est pas la seule solution à la stérilité d’une équipe.
Enfin, pour votre culture personnelle, sachez que l’auteur se fourvoie également sur la paire de défensifs alignés à Boulogne : Chantôme jouait milieu droit, Sankharé milieu gauche. Mais à ce niveau-là d’imprécision, une telle erreur serait presque anecdotique.
Une fois de plus la déclinaison internet de So Foot nous montre que derrière sa réputation de rédaction décalée, drôle et différente — probablement plus due au magazine papier — se cache une litanie d’articles rédigés en vitesse, truffés de clichés, de fausses informations et d’analyses faites sans avoir vu les matches traités. Quand on évoque des journaux décalés sur le football, on a tendance à citer So Foot et Les Cahiers du Football. Si ce dernier fait honneur à sa réputation en fournissant une pertinence dans les analyses encore trop rare ailleurs, le site de So Foot ne peut pas être placé à la même hauteur. Promis, nous allons essayer de ne plus relever les âneries provenant de cette rédaction. De toutes façons, cela nous donnerait trop de travail.