Après la finale de la coupe de France 2003 contre Auxerre, repartons encore plus loin dans le passé avec le premier trophée remporté par le PSG : la coupe de France 1982.
Les Verts face aux modestes Parisiens
Samedi 15 mai 1982, la finale de la 65e coupe de France oppose le champion de France en titre, l’AS Saint-Étienne, au Paris SG. L’affiche est inédite : jamais les deux clubs ne se sont affrontés dans cette compétition. Les Verts, déjà finalistes la saison précédente, sont donnés favoris. La célèbre finale perdue contre le Bayern Munich en 1976 est encore dans toutes les têtes. En cette fin de saison 1981/1982, l’ASSE a laissé filer le titre au profit de l’AS Monaco, mais parvient tout de même à conserver la place de dauphin. Les Verts restent sur neuf matches sans défaite — lors de la dernière journée, ils ont atomisé Metz 9 buts à 2 au stade Geoffreoy-Guichard.
De son côté, le PSG avait accompli la saison passée la meilleure performance de son histoire, mais le bilan est modeste : une cinquième place en D1 et une élimination en seizièmes de finale de coupe de France. Jusqu’alors, son meilleur bilan en coupe de France remonte à 1975 et une élimination en demi-finales. En 1981/1982, comme les Stéphanois, les Parisiens ont souffert en fin de saison : la quatrième place obtenue en mars n’est plus qu’un lointain souvenir : avec seulement deux victoires lors des neuf derniers matches — contre cinq défaites —, le PSG se classe finalement septième, loin des places européennes.
En coupe de France, les Parisiens sont successivement venus à bout de Nîmes (D2 — aux tirs au but), Nœux-les-Mines (D2), Marseille (D2) et Bordeaux (D1 — après prolongation). En demi-finales, quelques jours plus tôt, c’est à nouveau aux tirs au but que le PSG a éliminé Tours (D1), grâce à une performance exceptionnelle de Dominique Baratelli, qui a repoussé quatre des cinq tentatives tourangelles. L’ASSE a quant à elle éliminé Bastia en demi-finales, son bourreau de la saison passée.
Paris SG 2-2 AS Saint-Étienne
Pour la première fois, un match du PSG est retransmis en direct à la télévision : les images sont diffusées sur TF1, et commentées par Michel Denisot. Les abonnés parisiens ont pris place en tribune Auteuil, la seule qui leur soit réservée — tous les abonnés n’ont donc pas obtenu de billets, bien que 46 160 spectateurs soient présents. En championnat, les deux clubs s’étaient neutralisés sur le score de 0-0, à Saint-Étienne comme à Paris. Le scénario se reproduit jusqu’à l’heure de jeu : malgré une domination parisienne, les occasions sont rares. Surjak a bien ouvert le score sur coup-franc, mais l’arbitre Michel Vautrot a logiquement refusé de valider ce but qu’aucun Parisien n’a touché alors qu’il s’agissait d’un coup-franc indirect. La situation évolue finalement à l’heure de jeu : sur un centre en retrait de Surjak, côté gauche, Toko contrôle de la cuisse droite puis reprend de demi-volée du pied gauche (1-0, 58e). Michel Platini, qui dispute là son dernier match avec les Verts avant de rejoindre la Juventus Turin, égalise moins de vingt minutes plus tard d’une reprise aux six mètres, après un centre venu de la gauche dévié de la tête au point de penalty (1-1, 76e).
Exceptionnellement, la coupe du monde 1982 débutant quelques jours plus tard, le match n’est pas rejoué, comme c’était la règle à l’époque [1] — cinq finales avaient été rejouées dans le passé. En prolongations, Michel Platini donne l’avantage aux hommes de Robert Herbin d’une nouvelle reprise en pleine surface (1-2, 99e). Les coéquipiers de Laurent Paganelli ont le match en main jusqu’à la 120e et dernière minute… Jusqu’à un nouveau centre de Surjak, côté droit cette fois, pour une nouvelle reprise de volée à l’entrée des six mètres, signée Dominique Rocheteau (2-2, 120e). L’Ange Vert — qui deviendra par la suite meilleur buteur de l’histoire du club (100 buts), jusqu’à Pauleta — crucifie son ancienne équipe dans les dernières secondes, et libère le Parc des Princes. Les supporters envahissent le terrain — sans aucun incident… —, et Francis Borelli s’agenouille sur la pelouse pour embrasser la pelouse (voir plus bas).
Une fois le calme revenu, une demi-heure plus tard, les deux équipes doivent encore disputer la séance des tirs au but. Ce sera la troisième fois pour les Parisiens cette saison-là, après Nîmes (4-3) et Tours (2-1) lors des tours précédents.
Les joueurs des deux équipes réalisent un sans-faute : Battiston, Zanon, Rep, Larios et Platini marquent pour Saint-Étienne, tandis que Bathenay, Renaut, Rocheteau, Surjak et Fernandez leur répondent [2]. Dans la phase de la mort subite, Dominique Baratelli détourne d’entrée le tir au but de Lopez. Jean-Marc Pilorget, qui deviendra le joueur le plus capé de l’histoire avec 435 matches officiels disputés sous le maillot du PSG, se présente alors devant Jean Castaneda. Le gardien stéphanois anticipe sur sa droite, il est pris à contre-pied : le PSG vient de remporter le premier trophée de son histoire. Francis Borelli, sa célèbre sacoche à la main, court après Pilorget pour féliciter le buteur décisif. « Si on y a mis le temps, on y a aussi mis la manière, puisque Paris ne fait pas les choses comme tout le monde », expliquera le président parisien le lendemain de la plus longue finale de l’histoire sur le plateau de Téléfoot. Le Paris Saint-Germain est le septième club parisien à inscrire son nom au palmarès de la coupe de France — un record —, le premier depuis 1949 !
Dominique Bathenay, l’ancien Stéphanois, reçoit des mains de François Mitterrand sa quatrième coupe de France — après trois remportées avec l’ASSE. Il deviendra recordman de l’épreuve la saison suivante, lorsque le PSG gagnera son deuxième trophée consécutif face au FC Nantes. Depuis, il a été rejoint par Alain Roche [3] (1986 et 1987 avec Bordeaux — 1993, 1995 et 1998 avec le PSG).
Après le match de barrages pour l’accession en première division contre Valenciennes en 1974, cette finale est le premier grand match de l’histoire du club. Enfin ce premier trophée est également synonyme de première qualification européenne pour le Paris SG.
PSG : Baratelli — Fernandez, Pilorget, Bathenay, Col (Renaut, 119e) — Lemoult, Boubacar, Dahleb (Ngom, 83e) — Toko, Rocheteau, Surjak. Entraîneur : Georges Peyroche.
Francis Borelli embrasse la pelouse
Le baiser de Francis Borelli sur la pelouse du Parc des Princes après l’égalisation de Rocheteau dans les ultimes secondes des prolongations fera le tour des télévisions. Après le match, le président parisien expliquera son geste sur le plateau de TF1 :
Je n’ai pas coutume d’être assez expansif, bien que je sois méridional, mais on ne peut pas contenir une telle joie. Un couronnement de cette nature, c’est tellement extraordinaire qu’on est tout à sa joie, on ne regarde pas, on ne calcule pas, il n’y a pas de comédie, c’est spontané. Et j’avoue que je suis trop heureux pour les Parisiens…
Le geste spontané du président parisien n’a d’ailleurs pas surpris outre mesure sa fille, Lucie Borelli, que nous avions interrogée en septembre dernier :
C’était quelqu’un d’enthousiaste, avec un tempérament du sud — donc qui pouvait s’enflammer —, qui avait définitivement une passion absolue et totale pour le foot, et un amour immense et démesuré pour son club. Tout cela conjugué a abouti à cette fameuse image que tout le monde a encore en tête.
Le 28 février 1987, Borelli explicitait encore ce geste dans Paris SG magazine :
Le but de Rocheteau, c’est le moment le plus intense de ma vie. Je n’y croyais plus. C’était cuit, pour plaisanter, je disais aux gens à côté de moi : « On ne peut pas ne pas égaliser ! » Et puis Rocheteau a marqué… C’était la délivrance ! L’explosion de joie ! Impensable… Alors, j’ai embrassé la pelouse, cette terre bénie du Parc, pour remercier le ciel… comme les Musulmans que je voyais en Tunisie, qui embrassaient la terre pour remercier leur Dieu.
Plus d’infos : lire le portrait de Francis Borelli raconté par sa famille
La fête d’après-match
En septembre 2008, à l’occasion de l’inauguration de la tribune présidentielle-Francis Borelli, Florian, habitué du Parc des Princes depuis les années 1980, nous racontait les principaux souvenirs qu’il gardait de Francis Borelli. Parmi eux, la nuit du 15 mai 1982 :
Vers 5 heures du matin, nous sommes une vingtaine de supporters devant le Pavillon Gabriel, où se trouvent les joueurs, avec le journal du dimanche qu’on vient d’acheter. Borelli vient au balcon, on l’appelle : « Francis, on a soif. » Il redescend, avec Luis entre autres, pour nous montrer la coupe, et il nous offre le champagne. C’était « monsieur Francis Borelli ». Un gentleman !
Le PSG célèbrera cette victoire deux jours plus tard sur les Champs-Élysées, devant 5 000 supporters.
- Paris fête la victoire à {Stade 2.}
D’autres vidéos de cette époque sont disponibles sur le site de l’INA :
Thierry Roland (Stade 2) se fait arroser par Luis, avec la complicité de Borelli ;
Reportage sur le match sur TF1 ;
Reportage sur le match sur Antenne 2.
- Paris fête la victoire à {Stade 2.}