Interview de Leonardo
Leonardo a rencontré L’Équipe et le Parisien. Ce mardi, le Parisien et L’Équipe publient la retranscription d’une interview à laquelle ils ont été conviés ensemble, même si aucun des deux journaux ne le dit explicitement. « Il est arrivé en s’excusant pour ses dix minutes de retard, raconte le quotidien sportif. Leonardo venait de quitter la maternité de l’hôpital Saint-Antoine, dans le 12e arrondissement de Paris, où son quatrième enfant, un fils prénommé Tiago, est né dimanche après-midi. “Avoir un enfant ici, pour moi qui suis brésilien, avec ma femme italienne, c’est fantastique, dit-il en préambule. Les gens ont été formidables.” Durant près d’1h45, attablé à l’intérieur d’un café à Saint-Germain-des-Prés où il semble avoir ses habitudes, le directeur sportif du PSG […] est ensuite revenu sur l’actualité du club parisien. »
Le Parisien se montre plus précis dans son descriptif de l’entretien : « Maintes fois repoussé, le rendez-vous a finalement été fixé hier après-midi, dans un établissement huppé de Saint-Germain-des-Prés, dans le 6e arrondissement de Paris. Leonardo ne laisse rien au hasard. Il a choisi le lieu et ses interlocuteurs. Il se présente avec un quart d’heure de retard et se confond en excuses. Le directeur sportif du PSG a les traits tirés. Il le sait et a refusé la présence d’un photographe. Dimanche après-midi, sa compagne, Anna, a donné naissance à Tiago, le quatrième enfant du Brésilien. Ce dernier ne trouve pas de mots assez forts pour louer la compétence et la gentillesse du personnel de l’hôpital Saint-Antoine (12e arrondissement) qui a accompagné le couple lors d’un interminable accouchement. Après avoir commandé un expresso et un verre d’eau, Leo, dans un tee-shirt noir à manches longues qui laisse deviner une silhouette toujours parfaite, se prête comme prévu au jeu des questions-réponses. La discussion va durer 1h30. »
La rumeur Ancelotti et l’avenir de Kombouaré
Leonardo dédramatise la rumeur Ancelotti. « Sincèrement, je crois qu’aujourd’hui on doit s’habituer à tout ça, estime le directeur sportif parisien à propos des remous de ces derniers jours. On parle du PSG partout. En Espagne, en Italie, au Japon, on a entendu parler de Wenger, de Mourinho, de Benitez et maintenant Ancelotti. Il faut s’habituer à cela, car cela arrivera continuellement. Et c’est un peu normal… […]
Est-ce que j’ai vu Ancelotti la semaine passée ? Il était à Paris, et je l’ai vu, oui. J’ai aussi vu Kaka, j’ai vu beaucoup de gens sans que vous le sachiez. Aujourd’hui, tout le monde appelle le Paris Saint-Germain. C’est nouveau, et c’est bien pour le club. Mon travail, c’est de parler avec tout le monde. Pas forcément pour recruter l’un ou l’autre, mais aussi pour construire un réseau. » (sources : L’Équipe, le Parisien)
« Pas de proposition à Carlo Ancelotti. » L’Équipe a demandé à Leonardo s’il avait proposé le poste d’entraîneur du PSG à l’Italien : « Non, assure l’ancien Milanais. Il n’y a jamais eu de proposition directe. Antoine connaît sa situation depuis le début. Elle n’a pas changé. On a déjà parlé mille fois de tout, et tout est vraiment clair entre nous. Je sais ce qu’il pense, il sait ce que je pense. Il n’y a rien de caché. Aujourd’hui, on est premiers, on a fait beaucoup de bonnes choses, il y a aussi d’autres choses sur lesquelles on doit faire mieux. En début de saison, l’objectif était la qualification pour la Ligue des champions. Mais la situation [de l’équipe] a changé : on est premiers du championnat. Qu’est-ce que je fais ? Je suis obligé de penser à gagner le titre. […]
Kombouaré a rappelé récemment que l’objectif qui lui avait été fixé était la Ligue des champions ? Durant deux ans, Antoine a connu une période plus difficile du club. Il a des choses dans la tête qui sont un peu différentes. Mais ça, c’est normal. Sincèrement, on n’avait jamais pensé être premiers aussi vite. Mais aujourd’hui, on se doit de se maintenir à cette place, et c’est très dur. Parce que pour gagner un championnat, même le verre d’eau, là (il montre un verre posé devant lui), il est important. Alors, mon travail, c’est de contrôler ce qu’il se passe. Je suis quelqu’un d’exigeant, je veux gagner.
Antoine Kombouaré sera-t-il bien sur le banc contre Nancy, dimanche ? Bien sûr. La situation n’a pas changé. […] Sera-t-il l’entraîneur du PSG jusqu’à la fin de la saison ? L’idée, c’est celle-là. C’est aussi de tout gagner, dans le sens, en tout cas, d’être compétitifs dans toutes les compétitions. Il a… (il se reprend) on a les moyens d’y arriver. Après, quand Marseille a perdu trois matches, c’était la folie, et on parlait d’un changement d’entraîneur. C’est la vie de l’entraîneur. Ce n’est pas un problème. Il n’y a rien, aujourd’hui, qui nous inquiète. On est vraiment tranquilles. […] Le bon entraîneur, le bon joueur, le bon dirigeant, il n’a pas peur de perdre un poste. Si tu as peur de perdre ton poste, c’est la première chose que tu fais pour le perdre. Non, tu dois aller tout droit. Et Antoine, je crois qu’il va tout droit. Il est solide. »
« Je veux rester en Angleterre, a de son côté affirmé Carlo Ancelotti. C’est normal qu’il y ait des rumeurs puisque je suis libre. Mais je vous l’assure, il n’y a rien de concret [avec le PSG]. »
Kombouaré et Leonardo, suite. Le quotidien sportif insiste alors sur la situation d’Antoine Kombouaré : « Quels reproches je lui fais ? Ça, cela reste entre nous deux, c’est normal. Un grand club ne doit pas régler ses problèmes dans la presse. […]
L’affaire Ancelotti le fragilise-t-elle ? Penser cela, c’est dévaloriser Kombouaré. Il n’est pas fragile, il a un caractère très fort, des valeurs très fortes, il connaît le métier, il sait qu’on est au Paris Saint-Germain, il connaît les objectifs. La pression, dans le football, c’est normal. […]
Je voulais Ancelotti dès cet été ? Mais on avait aussi la possibilité de changer Kombouaré dès le début, hein ?! Personne ne m’obligeait à rien. […]
Si Kombouaré perd trois matches d’affilée ? Et si je sors de ce café et que… Je ne sais pas ce qu’il peut se passer, tout peut se passer. […]
Antoine Kombouaré est l’entraîneur du Paris Saint-Germain. Point. […] Y a-t-il déjà eu un clash entre Antoine Kombouaré et moi depuis le début de saison ? Nous sommes deux personnes qui cherchons à parler sans aller au clash. On parle librement, c’est tout. […] Sous quelles conditions pourrait-il rester l’entraîneur du PSG la saison prochaine ? Je crois que même Kombouaré ne se pose pas des questions comme celle là. Quand on entraîne, on pense au travail, on pense au prochain match, c’est tout… Il faut se mettre quelque chose en tête : pour que le club soit grand, il faut qu’il soit au-dessus d’un entraîneur, d’un directeur sportif, d’un joueur, même si c’est Pelé. Sinon, le projet, il est tout petit. Et ça, c’est une question de mentalité. Mais cela ne change rien à la situation de Kombouaré. Kombouaré, il a les moyens, il connaît la situation, il est là pour gagner les matches. On a le même objectif. Le même ! Et ça, c’est clair entre nous. »
Leonardo n’entraînera pas le PSG. L’ancien entraîneur du Milan AC puis de l’Inter Milan a par ailleurs assuré qu’il ne prendrait pas la tête de l’équipe parisienne, quelles que soient les circonstances : « Si cela se passait mal et que je n’arrivais pas à trouver un entraîneur d’envergure, aurais-je peur que l’on me demande d’aller sur le banc ? (Il rit.) Je n’ai aucune peur. Je ne dis pas que je n’entraînerai plus jamais de ma vie. Mais je n’entraînerai pas le Paris Saint-Germain, ça, c’est sûr. […] Même pour rendre service ? Non. Cela n’aurait pas de sens. Mais on ne me le demandera jamais. Les dirigeants connaissent mon opinion là-dessus. »
« Le PSG est entré dans la cour des grands. » Interrogé sur l’intérêt que le PSG pourrait représenter pour « un entraîneur comme Ancelotti », Leonardo assure que Paris a changé d’ère : « La France n’est pas habituée à être dans le marché européen. Jusqu’à maintenant, elle exportait des joueurs et des entraîneurs. Le PSG inverse la tendance. Ancelotti, Benitez, Mourinho, Wenger, les grands joueurs, s’ils sont sans club, tout le monde les contacte. Si Messi quitte un jour Barcelone, où va-t-il aller ? Seuls cinq ou six clubs peuvent l’accueillir. Pareil pour Neymar. On est entrés dans la boucle comme dans toutes les grandes affaires. Il faut s’y habituer. Beaucoup de joueurs veulent venir. » (source : le Parisien)
Les autres rumeurs de transferts
Leonardo fait le point sur le dossier Beckham. Les deux quotidiens du groupe Amaury ont naturellement évoqué le transfert de David Beckham, en stand-by au moins d’ici la fin de saison de l’Anglais aux États-Unis : « Beckham est unique, il a fait une carrière incroyable, il est très heureux dans sa vie à Los Angeles, mais ce choix dépend beaucoup de sa famille. Je ne suis ni optimiste ni pessimiste. Mais cela montre que le PSG est entré dans ce monde. J’espère utiliser cela pour construire quelque chose d’important. […] On lui laisse le temps, c’est une structure importante, sa femme, ses quatre enfants, c’est intime. Mais je ne sais pas ce qui va arriver. […]
Nous a-t-il demandé des garanties sur son temps de jeu ? C’est un joueur intelligent, il n’a jamais demandé cela ! Tout le monde a besoin de temps de jeu, même Kebano. Nous, on a besoin de joueurs en forme. Il y a de la concurrence, personne n’a sa place assurée.. […]
Quel est l’intérêt sportif de recruter David Beckham à 36 ans ? Vous avez vu ses derniers matches ? Il serait le premier à dire : “Je ne viens pas” s’il ne s’en sentait pas capable. […] Javier Zanetti, à l’Inter, a 38 ans. C’est dans la tête. Un joueur a besoin de jambes et de la tête. » (source : le Parisien)
Eto’o, le mercato et le staff médical. A propos du prochain mercato hivernal, Leonardo est resté très prudent : « Le mercato dépend toujours de l’équipe. Imaginez que l’on ait dix blessés en janvier… On a déjà eu huit blessures importantes, des claquages… Là-dessus aussi, on doit être attentifs. On doit tout faire pour que cela n’arrive plus. […] Samuel Eto’o a dit récemment qu’il ne fermait pas la porte au PSG ? Nous non plus. Pourquoi on fermerait la porte ? Elle est ouverte. »
« Vous laissez entendre que vous n’êtes pas satisfait du staff médical », relance L’Équipe. « Je ne serai jamais satisfait, répond le Brésilien. Mais ce n’est pas qu’une question du staff médical. »
La saison 2011/2012 du PSG
« La guerre des ego ? On n’est pas à l’église… » Au sujet des imperfections dans le jeu parisien, Leonardo rejette les critiques de la presse spécialisée : « On a besoin de temps, estime-t-il. Quand il y a beaucoup d’arrivées, les joueurs font ce qu’ils sont habitués à faire. Ensuite, ils doivent réaliser des choses qui sont bonnes pour tout le monde. Cela demande un peu de temps. Après, on parle d’ego… On ne peut pas traiter les joueurs comme ça, ce ne sont pas des enfants. Vous aussi, vous pouvez avoir des comportements qui ne conviennent pas, parce que, à un moment, vous êtes plus fragiles. Tout le monde a un ego, vous, moi… […] Gameiro et Nenê qui se disputent un ballon pour tirer un penalty ? Quand je vois les conférences de presse, entre journalistes, c’est pire… Ce qui compte, c’est que la structure soit forte. Celui qui doit tirer le penalty le tire. L’autre est fâché ? Ça va passer… Mais les ego seront toujours là. Le football, ce n’est pas une utopie, on n’est pas à l’église, et moi, je ne suis pas candidat au prix Nobel de la paix. »
Pastore, la fatigue et la Ligue Europa. Interrogé dans le Parisien sur les déclarations de Javier Pastore, qui a estimé qu’il était fatigué car il n’est pas habitué à jouer tous les trois jours, Leonardo a contesté cette idée : « Il dit ça car il l’a entendu quatre fois et il y a cru ! Mais il va gérer ça. Il a 22 ans, il va apprendre. Son bilan est largement positif. Regardez ce qu’il a fait lors de ces trois derniers mois avec le contexte et la pression. Pour moi, c’est un joueur exceptionnel. J’ai zéro inquiétude. […] Je le répète, on doit penser que jouer trois matches par semaine, c’est la normalité. Il n’y a pas de pression ici. Moi j’en veux beaucoup plus ! Là, sincèrement, il n’y en a pas trop. J’espère que la pression positive va monter sans cesse. Il faut se dire (il tape dans ses mains) : “On veut, on veut ! On a perdu et ce n’est pas bon. Alors on va s’entraîner mieux et lutter.” Il faut que tout le monde embrasse le projet. Ce n’est pas le mien ni celui du Qatar. C’est celui de Paris, celui de la ville. Paris n’a jamais utilisé son vrai potentiel. Là, on est premiers et on va chercher à le rester et à être champions. »
L’Équipe revient également sur l’élimination en huitièmes de finale de la coupe de la Ligue à Dijon : « Est-ce vrai que cela vous avait agacé ou, après tout, n’était-ce qu’un trophée mineur ? », interroge le quotidien sportif. « Un trophée mineur ? C’est une défaite. On ne peut pas perdre à Dijon, rentrer à Paris, et manger tranquillement en se disant : “C’est la vie.” Non. Si tu penses comme ça, la défaite devient la normalité. Moi, je ne serai jamais satisfait. Toutes les équipes de haut niveau jouent tous les trois jours. Si tu vas à Dijon, c’est pour gagner. Tu peux perdre, mais tu dois y aller pour gagner.
Avec la coupe d’Europe, il y a vraiment quelque chose de contradictoire en France. Tout le monde joue le championnat pour se qualifier et, quand on y arrive, on dit : “On va gérer.” Je comprends que certains clubs soient obligés de faire des choix, en raison de leur effectif. Mais pas à Paris. Jamais. »
Leonardo défend Lugano. « Suis-je déçu par les performances de Diego Lugano ? Non, répond Leonardo dans L’Équipe. La situation, pour lui, est différente [de celle de Pastore]. Il est plus âgé (31 ans), il a besoin de plus de temps. Pour quelqu’un de plus âgé, la préparation est fondamentale. Et avec la Copa America qu’il a disputée cet été avec l’Uruguay, cela a été compliqué pour lui… […] Est-ce qu’il sera bon ? Il est bon. Est-ce qu’il sera bon ici ? Je ne sais pas. Mais ce qu’il a fait dans sa carrière, c’est indiscutable. »
Sa situation personnelle
A propos de « l’œil de Moscou ». Les deux journaux ont interrogé Leonardo sur Angelo Castellazzi, que certains joueurs surnommeraient « l’œil de Moscou ». « Angelo Castellazzi est là pour créer une base de données [vidéo] qui pourra être utilisée par tout le monde dans le club, et c’est très important, a expliqué le Brésilien. Cela n’a rien à voir avec Antoine Kombouaré. […]
Qui [l’appelle comme ça] ? Dites les noms ? N’ayez pas peur… Les joueurs ont peur ? Si un joueur a peur, il ne peut pas rester ici. Et puis bon, les joueurs, ils rigolent, aussi… Après, s’ils appellent Angelo l’œil de Moscou, vous pensez que c’est un problème pour moi ?
Est-il là pour me rapporter ce qu’il se passe au Camp des Loges ? Si j’ai besoin d’Angelo pour savoir ce qu’il se passe, je n’ai rien fait dans ma vie… »
« On n’est pas là pour dire qu’on est beaux. » En guise de conclusion, le Parisien interroge Leonardo sur son absence de communication ces derniers jours, que le quotidien présentait, la veille, comme l’explication des articles annonçant le départ imminent de Kombouaré : « Je ne vais pas toujours commenter les rumeurs, s’est opposé le directeur sportif parisien. Et ceux qui sont concernés n’ont pas besoin de cela. Je n’ai pas peur de perdre ma place. J’étais à Milan puis à l’Inter et là je suis au PSG. Maintenant, c’est la cour des grands. Avant, il y avait beaucoup de politique ici et on a cassé tout cela. »
Enfin L’Équipe l’a invité à réagir au fait que son image a été écornée ces derniers jours : « On n’a encore rien fait. On n’est pas là pour dire qu’on est beaux. Il faut que l’on structure ce club. Aujourd’hui, on est encore fragiles, ça, c’est évident. […] L’image que tu as est toujours pire ou meilleure que la réalité… Mais si je pensais tant que cela à mon image, je n’aurais pas entraîné Milan dans les conditions de l’époque, je ne serais pas allé du Milan à l’Inter, le rival, et je n’aurais pas quitté l’Inter… Je cherche l’émotion, c’est tout. […] J’ai 42 ans. Je ne suis pas un enfant. Sincèrement, je n’ai pas trop d’instabilité dans ce domaine. »