Alors jeune Parigot ! Tu crois que je ne te vois pas, tout penaud devant ton miroir un jour de match ? Tu recherches la tenue adéquate pour rejoindre le Parc des Princes, et éviter ainsi de te faire bourrer de coups de pieds par les vilains supporters du PSG ? Comme je te comprends : on n’est jamais trop élégant pour venir à Paris… et surtout on n’est jamais trop prudent. Mais je m’égare et te laisse tremblant de froid et de peur dans ta chambrette constellée de posters de John Cena. Rassure-toi petit freluquet, tu ne risques plus de te faire taper dessus à Boulogne, même si tu fais preuve du plus mauvais goût vestimentaire. Eh oui, tout se perd… En revanche, le supporter parisien étant taquin, il est fort probable que tu sois toujours la cible de menues railleries, et ça, en pleine adolescence, ça peut te laisser plus de traces qu’un tacle de Diawara. Alors voici mes conseils.
Règle numéro un, ce n’est pas parce que tu viens au Parc qu’il faut te sentir obligé d’arborer un maillot de football ! On voit trop de jeunes débarquer en tribune avec un sourire satisfait sur le visage et un maillot de l’équipe de France sur le dos. Grossière erreur : ici, notre patrie, c’est Paris [1] ! Et afficher dans un virage parisien ton flocage Ribéry, c’est pire qu’une provocation : c’est une insulte au bon goût. Non, mieux vaut venir en civil plutôt qu’avec un maillot d’une équipe nationale, quelle qu’elle soit. Alors toi, ami lecteur du 10 Sport, qui te rêve une ascendance exotique, je te le dis tout de go : on s’en fout que la belle-mère du cousin de ta tante soit d’origine portugaise, ou marocaine, ou sud-morave. Ta serpillière Cristiano Chamackaldo, tu la gardes précieusement dans ton armoire en réserve pour la prochaine réunion de famille. Mais au Parc des Princes, soit t’es Parisien, soit t’es rien.
Le mieux, évidemment, c’est de pouvoir revêtir le maillot bleu-blanc-rouge-blanc-bleu. Le classique. Le maillot Hechter. Certes, je sais bien qu’on fait tous des erreurs de jeunesse, et que ta garde-robe compte peut-être une de ces atrocités que les esprits malades de chez Nike nous ont sorties il y a quelques années. Mais gamin, ce n’est pas parce qu’il t’a été vendu avec l’emblème à la Tour Eiffel et au berceau cousu sur le cœur qu’un maillot est un maillot du PSG ! Il va falloir affronter la vérité en face, parce qu’elle piquera toujours moins les yeux que ce truc que tu voudrais nous infliger en tribunes : ton maillot à pois d’il y a deux saisons, aujourd’hui plus personne ne sait qu’il représentait Paris. Et tu t’es fait enfler de 75 €. Bienvenue chez les victimes du merchandising, le département du club qui porte vraiment bien son nom puisqu’il est chargé de te faire acheter des merdes et des chandails. Et visiblement, ça marche… Alors pitié, si tu viens avec un maillot, prends en un du PSG… qui ressemble à un maillot du PSG. Assume ton passage du côté obscur de la L1 !
Autre erreur fréquente à éviter dans le choix de ta tenue, surtout évite de vouloir de trop bien faire ! Parce que je t’ai vu petit gavroche, lors du dernier match au Parc : était-ce le fruit d’une trop longue hésitation entre l’écharpe bleue siglée PSG, la rouge de la saison dernière et celle que tu as achetée au marché aux puces en vacances, ou bien avais-tu succombé à la super offre flash, deux écharpes Lynx achetée et la troisième à moitié prix, je n’en sais rien, mais quoi qu’il en soit tu avais vraiment l’air d’un con avec une écharpe autour du cou, et deux autres pendouillant mollement aux poignets. Eh ! L’été n’est même pas fini ! Perso, même en hiver j’ai dû mal à porter plus d’une écharpe à la fois, alors début septembre, trois d’un coup ? Tu avais peur de manquer, ou tu tiens vraiment à ressembler à un fil à linge pendu dans une ruelle napolitaine ?
Tout est question d’équilibre : que tu portes nos couleurs, oui… mais si les conditions ne s’y prêtent pas, alors ne te sens pas obligé de montrer que tu as acheté un maillot ! Les mecs qui tiennent à tout prix à enfiler leur tunique Pauleta par dessus une énorme doudoune quand il gèle à couilles-fendre devraient être interdits de stade. Non, même si Leproux aurait sans doute apprécié l’idée, jusqu’ici personne n’organise de concours de sosies « déguise-toi en M&M’s » dans nos tribunes ! D’ailleurs, comment font-ils pour enfiler un tee-shirt L par-dessus leur manteau ces gars-là ? Faudrait leur poser la question… J’imagine qu’avant de partir ils se mettent à quatre ou cinq pour dérouler le maillot au-dessus du type boudiné dans son blouson surgonflé. Tu me diras, ami lecteur inexpérimenté, ça doit être un bon entraînement en vue d’un premier rapport sexuel protégé. Une fois que tu as réussi ça, le préservatif, c’est une formalité.
Mais revenons à notre dress-code parisien. Donc tu es amateur des dribbles chaloupés de Nenê ? Féru des tacles de Cap’tain Sakho et pourtant, je le lis au rouge qui te monte aux joues, tu ne possèdes aucun maillot du PSG ? Mais pourquoi avoir honte ? Si tu veux vraiment prouver que tu es supporter, le mieux c’est encore de chanter en tribunes ! Pas de collectionner les produits PSG achetés dans des boutiques. Tel le jeune élève de kung-fu, apprends que celui qui compte, c’est le supporter qui est à l’intérieur de toi. Enfin pour venir à Auteuil, évite quand même le survêtement brillant en Tergal qui laisse voir l’imitation de boxer Calvin Klein dans laquelle tu as moulé tes fesses d’adolescent, tu seras gentil. N’oublie pas qu’ici, notre directeur sportif c’est Leonardo. Pas José Anigo, le fan du lycra. Un peu de fierté que diable, tâche de t’inspirer de la classe du bonhomme. On ne te demande pas de braquer une boutique Armani, ou de garder tes lunettes de soleil sur le nez pour un match débutant à 21 heures comme le font certains ! Il y a juste un minimum à assurer : viens habillé classe, et ça ira. Après, pour ceux qui aiment, une petite touche britannique fait toujours son effet. Sans tomber dans la caricature Lonsdale-Fred Perry.
Reste la règle d’or. Celle qu’il ne faut jamais enfreindre sous peine d’excommunication. Au Parc des Princes, pas de perruque colorée, pas de maquillage facial, ni de trompette. Si tu ressens une attirance coupable pour l’une de ces trois catégories, ne garde pas cette terrible nouvelle pour toi. Décharge ta conscience, et adresse-toi à l’hôpital Schaffner, à Lens : s’il y a un endroit susceptible d’être fréquemment confronté à ce type de pathologie, c’est cet hôpital. Après, s’ils te posent des questions sur ta sœur, tu ne te vexes pas, évidemment. Il faut respecter les traditions locales quand on voyage à l’étranger. Mais au PSG en tous cas, tu évites les clowneries vestimentaires.
Fais simple, de bon goût, parce que maintenant que tu représentes la ville de Paris, ton look à toi aussi va devenir une référence pour nos amis d’outre-périphérique montant au Parc visiter la capitale. Tu ne voudrais pas avoir une mauvaise influence sur eux, les pauvres ? Allez, retourne à tes saines occupations, et surtout, rappelle-toi qu’au PSG, notre fierté c’est de ne jamais abandonner.