Avant toute étude de cet article, il convient de poser la question de la crédibilité. Le Parisien ne donne aucune source, et le Paris Saint-Germain a démenti l’info sur son site officiel… Mais les journalistes ont pu capter des rumeurs concernant ce qui demeure encore un projet, et le démenti du club est aussi mou qu’une frappe de monégasques.
Ce programme ne sera certainement pas appliqué en l’état. D’ailleurs, le communiqué du PSG évoque un « contenu […] autant erroné qu’incomplet », qui « ne reflète pas l’état d’esprit dans lequel le PSG veut agir pour permettre à ses supporters de cohabiter paisiblement ». Ce démenti laisse donc entendre que de ces six points, certains pourraient voir le jour. Essayons de comprendre pourquoi le PSG en est arrivé là, et quelles en seraient les conséquences.
La fin des abonnements en virages
Quel objectif ?
Mettre fin aux abonnements en virage a pour but de rendre plus difficile la création de groupes dans ces tribunes. Sans certitude de pouvoir revenir semaine après semaine retrouver les mêmes personnes au même endroit, l’investissement personnel baissera de fait. C’est la fin d’un système d’habitués, qui connaissent leurs voisins par cœur et peuvent s’organiser avec eux.
Pourquoi ?
La principale difficulté de la lutte contre la violence en tribunes, c’est que l’on ne peut pas punir 5 000 personnes pour les agissements de 500. Fermer tout le Virage Auteuil après que quelques membres se sont battus en dehors du stade, vider le Kob parce qu’une poignée d’énergumènes ont entonné des slogans nationalistes, c’est impossible. En revanche, si vous cassez le système d’abonnement, vous rendez quasi impossible la planification de quelque acte que ce soit. Délictueux ou non.
Quels inconvénients ?
Avec la disparition des abonnés en virages, le Parc des Princes voit la mort de toute organisation des tribunes populaires. Et si les groupuscules violents auront peut-être davantage de mal à s’y organiser, en revanche tout le système de sonorisations, de chants lancés par des capos, etc. est certain de disparaître. L’ambiance sonore ne peut qu’en souffrir énormément.
Hausse des prix en populaires
Quel objectif ?
Deux possibilités ici. Il se peut que la direction du PSG imagine que si on retire du Parc les fans incapables de mettre 25 € par match alors on éliminera la violence. Cela serait particulièrement stupide, de nombreux hooligans bénéficiant de professions aisées. Ou alors le Parisien se trompe en croyant que la hausse des prix est un objectif voulu par le club. Le lendemain, le quotidien revenait d’ailleurs partiellement sur ses révélations, sans l’écrire explicitement : « La question de la hausse des prix ne fait pas l’unanimité entre les décideurs parisiens : Robin Leproux, le président, y est défavorable, au contraire de l’actionnaire, Sébastien Bazin. » [1]
Pourquoi ?
Les études sociologiques montrant une relation entre revenus financiers et violence dans les stades restent à prouver. Donc si le PSG voyait augmenter le prix en virages, ce ne serait probablement dû qu’à l’abandon du système d’abonnement. Plus qu’une hausse due à une décision stratégique, ce serait en fait la fin des tarifs réduits. Un dommage collatéral au niveau du porte-monnaie.
Quels inconvénients ?
Le PSG priverait alors tous les revenus modestes de leur passion. Mais surtout, il se priverait des traditionnels pourvoyeurs d’ambiance que sont par exemple les étudiants, souvent incapables de s’abonner ailleurs qu’en tribunes populaires.
Débaptiser Auteuil et Boulogne
Quel objectif ?
Une seule volonté ici : briser l’identité même du Kop de Boulogne et du Virage Auteuil. Ces tribunes mythiques ont chacune leur histoire, leur réputation, leurs usages. Et désormais elles s’opposent frontalement. Pour mettre fin à cela, la direction du Paris Saint-Germain aurait décidé de mettre à bas ses deux tribunes les plus célèbres.
Pourquoi ?
Les vives tensions entre Boulogne et Auteuil n’ont pas décru depuis le décès de Yann Lorence. Au contraire, les chants d’insultes entre le Virage et le Kop sont désormais quasi systématiques, et chaque tribune se replie sur elle-même dans la haine de l’autre. Les chants identitaires prennent le pas sur le reste, chaque tribune s’encourageant presque davantage elle-même que le reste du club.
Quels inconvénients ?
Mettre fin à Auteuil et Boulogne, c’est effacer respectivement 30 et 20 années d’histoire du Parc des Princes. Même s’ils n’ont pas connu que des actions glorieuses, le Kop of Boulogne et le Virage Auteuil n’en ont pas moins construit le visage actuel du supporterisme parisien. Avec tous ses défauts, mais aussi toutes ses qualités…
Création d’une tribune famille
Quel objectif ?
Les dirigeants du PSG cherchent à bouleverser sur le long terme la physionomie du public du Parc. Après avoir rasé ce qui existait, créer une tribune familiale planterait les germes d’une nouvelle génération de supporters.
Pourquoi ?
En se répandant en insultes vis-à-vis de la tribune d’en face, mais aussi de l’actionnaire, les virages ont effrayé les annonceurs et les investisseurs potentiels. Associer son nom au PSG d’aujourd’hui, c’est la quasi certitude de se voir conspuer toutes les deux semaines, parfois devant des millions de téléspectateurs. Les dirigeants veulent mettre fin à cette mécanique auto-destructrice qui consiste à mordre la main qui vous nourrit.
Quels inconvénients ?
Cette politique sera très difficile à mettre en place : vue la triste réputation du Kop de Boulogne et du Virage Auteuil, il faudra brader les billets avant d’espérer remplir les virages.
Identifier chaque spectateur
Quel objectif ?
Surveiller toujours plus finement qui rentre dans le Parc des Princes, à quelle place, et à quelle heure. Il est probable que le club exige d’autre part que chaque Parisien respecte à la lettre le placement indiqué sur son propre billet.
Pourquoi ?
Mêmes si les abonnements déjà sont tous nominatifs, les supporters pouvaient jusqu’alors se placer où ils le souhaitaient dans les virages. Impossible alors de tracer un fan allumant un fumigène, et ce malgré les nombreuses caméras. En profitant de l’effet de masse et des mouvements de foule, les supporters parvenaient le plus souvent à échapper aux sanctions.
Quels inconvénients ?
La protection de la vie privée serait bafouée. Certains supporters ne souhaitent pas forcément que le service de sécurité du PSG, ou le réseau billetterie puisse lister leurs allers et venues. Même si, dans les faits, tous les abonnés d’Auteuil et Boulogne étaient déjà fichés ces dernières saisons.
Organiser ses propres déplacements
Quel objectif ?
Empêcher les supporters de monter des déplacements autonomes. Et augmenter les possibilités de contrôle des fans parisiens lors du trajet.
Pourquoi ?
Ces déplacements en cars ou en petits convois laissaient aux supporters la possibilité de fixer des rendez-vous une fois à destination. Le but premier est de mettre fin aux fights organisées entre groupes adverses, loin des forces de police entourant les stades. De plus, en interdisant drogue et alcool, le PSG espère diminuer les comportements agressifs.
Quels inconvénients ?
Les supporters respectables, qui appréciaient de voyager par leurs propres moyens, pour aller assister à un match puis rester sur place chez des amis ou de la famille se verraient privés de cette liberté. Autre problème : certaines associations possèdent un savoir-faire que le club n’a pas. Le groupe Handicap PSG a déjà monté des projets pour permettre aux personnes à mobilité réduite de se rendre dans des tribunes adaptées à Lyon, Marseille et Strasbourg par exemple. Ils affrètent des cars capables d’accueillir les fauteuils roulants, les accompagnateurs, etc. Avec la fin des déplacements d’associations sonnerait le glas des déplacements pour les supporters parisiens victimes de handicaps.