À Paris, c’est bien connu, il se passe des choses extraordinaires qui n’ont jamais lieu ailleurs. Par exemple, le PSG joue des matches de coupe de France. Et pendant que Lille ou Rennes se font éliminer par des clubs de CFA dans l’indifférence générale, Paris gagne à Vesoul. Résultat ? Des bonnes séances de rigolade…
Lu dans la presse : « la honte », « le pire »
Paris s’est imposé sur le plus petit des scores face à Vesoul sur un terrain impraticable. Comme souvent en coupe de France, Paris a fait le métier, s’est imposé pendant que d’autres luttaient. Ce qui n’a pas empêché une foule de sarcasmes et de commentaires un peu acerbes — comme si la déception de ne pas voir le PSG sombrer encore plus l’emportait sur tout le reste. Le Républicain Lorrain titrait ainsi « Paris évite la honte », tout en assénant des blagues de potaches faisant assurément rire dans tous les bars de province. Le site web de L’Équipe mettait quant à lui l’accent sur le match moyen du PSG en titrant « Paris évite le pire ».
Rien de bien choquant en soi si dans le même temps le club amateur de Quevilly (CFA) n’avait pas battu le Stade Rennais, club tout aussi professionnel que le PSG. Ce match est passé presque inaperçu, et quand il a été mentionné, cela fut exclusivement pour mettre en avant la performance de Quevilly. Pas un mot sur le mauvais match de Rennes : ne vous y trompez pas, l’événement le plus honteux du football français mardi soir, c’est que le PSG se soit imposé de justesse. Paris ne sera finalement à l’abri que lorsqu’il gagnera toutes ses rencontres par 10 buts d’écart…
De la difficulté d’affronter des clubs éliminés…
Dans certains médias — radios notamment —, la qualification parisienne a fait ressurgir une vieille marotte : le PSG serait avantagé lors des tirages au sort. Il est vrai que depuis l’édition 2007, le PSG n’a jamais affronté un adversaire de L1 suite à un tirage au sort. Mais cela défie-t-il réellement les probabilités ? Ou est-ce simplement le nombre d’éliminations piteuses des clubs de L1 dès les premiers tours qui multiplie les chances pour le PSG d’affronter des clubs de moindre envergure ?
En quart de finale en 2008, Paris tombe sur Carquefou (CFA 2). Mais n’est-ce pas plutôt dû à Nancy (L1) puis Marseille (L1), qui se sont faits éliminer par cette équipe lors des tours précédents ? Le PSG est-il responsable du fait qu’en 2008, sur les quatre demi-finalistes, deux évoluaient en L2 ? Le fait est que Paris n’aurait pas autant de tirages dits favorables si les autres clubs de L1 avaient la bonne idée de se qualifier systématiquement face à des équipes a priori plus faibles.
Pour les quarts de finale cette année, Paris aura une chance sur sept de tomber sur Quevilly (CFA). La faute à Rennes (L1) et Angers (L2), qui n’ont pas été capables de battre les amateurs hauts-normands — ou à un tirage au sort truqué…
Le sketch de Canal+
Cette saison encore, en coupe de France, de nombreuses équipes professionnelles ont été éliminées par des clubs amateurs :
Lille (L1) s’est fait sortir par Colmar (CFA)
Rennes (L1) s’est fait sortir par Quevilly (CFA)
Nice (L1) s’est fait sortir par Plabennec (National)
Nancy (L1) s’est fait sortir Plabennec (National)
Laval (L2) s’est fait sortir par Vesoul (CFA)
Angers (L2) s’est fait sortir par Quevilly (CFA)
Par ailleurs, Nancy (L1) n’a empoché sa qualification contre Thiers (CFA 2) qu’aux tirs au but, de même que Saint-Étienne (L1) face à Villefranche (CFA).
L’occasion de raconter de belles histoires sur le charme de la coupe de France, et la leçon que le petit donne au gros. Mais parfois, le gros a la mauvaise idée de gagner. Comme le PSG, face à Aubervilliers (CFA 2), Evian TG (National) ou Vesoul (CFA). Du coup, le discours est un peu différent. Illustration de cette fascination pour le PSG-bashing avec le journal des sports de Sylvère-Henry Cissé ce mercredi matin sur Canal+ :
On va passer à quelque chose de beau : Patrick Vieira a fait une passe décisive dans le championnat d’Angleterre. […] Je vous ai montré ce qui est beau, et ce qui l’est moins c’est le PSG, qui l’a emporté un à zéro. Pourquoi « ce qui l’est moins », parce qu’ils ne l’ont pas emporté avec la manière. (brouhaha) Je suis désolé, ils ne l’ont pas emporté avec la manière. Un à zéro contre une équipe de CFA, dans des conditions difficiles certes, parce qu’il faisait froid et que le terrain était enneigé. Mais simplement ce sont des professionnels qui jouaient face à une équipe de CFA, c’est-à-dire niveau troisième division (sic). Une équipe du PSG au complet, et qui ne l’a emporté qu’un à zéro. […] En revanche, eux ils ont tout donné et ils l’ont emporté face à une équipe de L1, il s’agit de Plabennec, équipe de CFA également (sic), qui l’emporte 1-0.
Il s’agissait en fait des images de Quevilly (CFA, donc quatrième division), qui a éliminé Rennes (L1) — ce qui semble ne pas préoccuper grand monde — après avoir sorti Angers (L2). Plabennec évolue pour sa part en National, et avait sorti Nancy (L1) précédemment.
Une heure plus tôt, le sketch était le même :
— Sylvère-Henry Cissé : Maintenant, attaquons le dossier du PSG. (rires sur le plateau)
— Élé Asu : Vous avez dit « ah bon » quand j’ai dit qu’ils avaient bien joué. Ils ont fait le job : il fallait gagner, ils l’ont fait.
— Sylvère-Henry Cissé : Oui, mais ils n’ont fait que ça. Parce que… Sérieusement. Le PSG, d’accord, a brisé la spirale de la défaite, dans des conditions assez difficiles […]. Mais il n’y a eu que ça. […] Mais vous savez pourquoi je suis perplexe ? Parce que nous avons une équipe du PSG, un des gros budgets du football français, qui en coupe de France n’a éliminé que des équipes de CFA, de troisième division (sic), c’est-à-dire Aubervilliers (sic), Evian TG (sic) et là Vesoul. Et ensuite, là ce qui me laisse perplexe, c’est que le PSG, au complet, au complet sans Makelele mais au complet, a battu une équipe de CFA un à zéro, alors qu’elle se bat pour son maintien en troisième division (sic) et qu’elle a la plus mauvaise attaque de troisième division (sic), donc vraiment…
— Élé Asu : Oui mais elle [l’équipe du PSG] doute, et quand on doute, on est mois bons…
— Sylvère-Henry Cissé : La prochaine fois, pour le football, laissez-moi faire.
La tentative de la journaliste Élé Asu de s’imisser dans une discussion d’hommes a été vite annihilée. Laissons effectivement parler Sylvère-Henry, un véritable spécialiste de football… incapable de différencier National, CFA et CFA 2 [1].
Oui mais…
Le PSG a gagné. Comment en faire l’événement tragicomique de la journée malgré tout ? Très simple : sortez la boîte à « oui mais ».
Oui mais le terrain était enneigé, ça ne compte pas vraiment.
Oui mais contre un club amateur, c’était gagné d’avance.
Oui mais à peu de choses près Paris aurait pu perdre, quand on y repense.
Oui mais il n’y avait pas de projet de schéma de fond de jeu.
Oui mais la coupe de France, tout le monde s’en moque.
Oui mais il faut recruter, tout le monde le sait, tout le monde le voit, et Colony ne fait rien.
Bonus : le Parisien après la défaite 0-1 contre Monaco en janvier dernier, au terme d’un bon match.