Ce samedi, le Parisien revient sur la suspension de Zoumana Camara : d’abord sanctionné un match ferme et un match avec sursis par la commission de discipline de la LFP, le joueur a finalement écopé de deux matches ferme par la commission supérieure d’appel de la FFF.
Pourquoi le PSG a-t-il fait appel ?
Le sursis de Zoumana Camara aurait entraîné une suspension automatique du défenseur parisien dès le premier avertissement reçu d’ici la fin de la saison. L’article 169 du règlement administratif de la LFP précise :
Les sanctions à l’encontre des joueurs entraînant un ou plusieurs matches de suspension avec sursis sont réputées non avenues si, après leur prononcé, le joueur n’est pas exclu ou n’a reçu aucun avertissement pendant une période incluant dix rencontres de compétition officielle – Ligue 1, Ligue 2, coupe de la Ligue ou coupe de France – disputées par son club.
Le PSG a basé sa requête sur un vice de procédure : contrairement aux textes du règlement administratif de la Ligue, Zoumana Camara n’a pas été convoqué par lettre recommandée par la commission de discipline et n’a donc pas pu venir se défendre le 19 mars. Pourtant, le règlement administratif de la LFP est très clair sur cette obligation :
Article 157 : Dans tous les cas […], le secrétariat de la commission de discipline informe l’intéressé […] de la saisine du conseil par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou par lettre remise contre récépissé. Cette lettre précise le fondement sur lequel la commission est saisie. Elle indique les griefs formulés à l’encontre de l’intéressé et mentionne les droits dont il dispose pour présenter leur défense.
Article 160 : Le licencié poursuivi […] [est] convoqué par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou par lettre remise contre récépissé devant la commission de discipline, quinze jours au moins avant la date de la séance au cours de laquelle la commission est appelée à se prononcer sur les faits relevés à son encontre. […]
Article 163 : Lors de la séance, le rapport d’instruction est lu en premier. L’intéressé ou son représentant présente ensuite sa défense. […]
Pourquoi la FFF n’en a-t-elle pas tenu compte ?
La défense de Jean Lapeyre, directeur général adjoint de la FFF interrogé par le Parisien, est stupéfiante :
Nous n’avons pas retenu ce vice de procédure car selon nos textes, cette exclusion sur fait de jeu n’a pas besoin d’être mise en instruction et le joueur n’a donc pas à être convoqué. Il n’est convoqué que s’il commet une faute très grave, comme par exemple cracher au visage d’un arbitre. Nous avons toujours fonctionné ainsi. La défense du PSG était donc un peu légère.
La FFF se base donc sur son seul règlement pour dédouaner la LFP de ses erreurs — celle-ci n’a pas respecté les obligations figurant dans ses propres règlements — et refuse de reconnaître au club parisien le droit de se défendre comme le prévoient les textes. Pourtant, la même commission supérieure d’appel de la FFF concluait l’inverse il y a quelques mois. Le procès-verbal de la réunion du 23 janvier 2009 est limpide. Après que le PSG a fait appel des amendes infligées par la LFP pour usage de fumigènes contre Lyon et Valenciennes, la FFF statuait ainsi :
[…] Le PSG entend contester la validité des poursuites engagées à son encontre au motif que les droits de la défense n’ont pas été respectés en première instance. […] Il soutient que, n’ayant été destinataire d’aucune convocation pour les réunions de la commission de discipline de la LFP des 27/11/2008 et 23/12/2008 à l’issue desquelles il a été sanctionné, il ne pouvait connaître l’existence d’une procédure disciplinaire engagée à son encontre et ainsi préparer sa défense. […] Le club soulève également qu’en ne convoquant pas les parties, le club a été privé d’un débat contradictoire et d’un double degré de juridiction. […] Il estime [dès lors] que les poursuites disciplinaires engagées à son encontre sont affectées de nullité.
[…] Les dispositions des articles 156 à 167 du règlement administratif de la LFP rappellent les règles de procédure visant à garantir le respect des droits de la défense des joueurs et des clubs poursuivis disciplinairement.
Considérant que la commission de discipline de la LFP n’a pas respecté les prescriptions obligatoires précitées en matière de droit de la défense, et qu’il convient donc d’annuler ces décisions pour vices de forme, […] et que la commission supérieure d’appel de la FFF peut décider de renvoyer l’intégralité du dossier devant la commission de première instance afin que cette dernière engage une procédure disciplinaire régulière […], elle annule les décisions contestées pour vices de forme et renvoie les dossiers devant la commission de discipline de la LFP.
Pourtant, Jean Lapeyre base son argumentation comme s’il s’agissait d’un appel sur le fond, et non d’un vice de forme : « Nous avons appliqué le barème fédéral. Il s’agit d’un anéantissement d’occasion de but. C’est donc deux matches de suspension. La commission de discipline a plutôt l’habitude de sanctionner ce genre de faute d’un match ferme et d’un avec sursis. Peu de clubs se risquent donc à faire appel de leur décision car ils savent que nous allons l’alourdir. »
Avec un tel fonctionnement — disparité revendiquée des sanctions disciplinaires, non prise en compte des droits de la défense et des erreurs de droit manifestes —, on comprend mieux la gabegie régnant dans le football français. Les sanctions à la petite semaine ont de beaux jours devant elle. Pascal Wilhelm, avocat du PSG, résume l’affaire dans les colonnes du Parisien : « Camara voulait s’expliquer, c’est tout. Les instances du football sont dans une automaticité contraire à la justice d’un pays démocratique. La justice, c’est de pouvoir faire valoir sa défense. » D’après le quotidien, Wilhelm est convaincu d’obtenir gain de cause s’il portait l’affaire hors des instances du football français (CNOSF, Tribunal administratif, Conseil d’État…), mais le PSG ne le fera pas : l’appel n’étant pas suspensif, cela n’empêcherait pas l’absence de Camara demain contre Nice.