À la 64e minute du match Lituanie-France, Karim Benzema rentre sur le terrain en lieu et place de Peguy Luyindula. Un joueur pas toujours titulaire au PSG, aligné d’entrée en Équipe de France, et ce au détriment de la star incontestée de l’OL : voilà qui peut flatter l’égo des supporters parisiens. Et si l’on se rappelle du début de saison, lorsque Luyindula était presque indésirable au PSG, on ne peut qu’être admiratif devant le parcours accompli depuis par le natif de Kinshasa. Il n’empêche que la situation reste assez inhabituelle : comment un joueur qui n’avait plus mis les pieds en Équipe de France depuis quatre ans et qui a été rappelé à la dernière minute a-t-il pu se retrouver titulaire si subitement ?
Une titularisation finalement pas si surprenante
Après le match, que les observateurs estiment le choix payant ou non, tous sont unanimes pour dire qu’ils ne le comprennent pas. Pourtant, il faut bien avouer que les forces en présence ne laissaient pas énormément de choix au sélectionneur national. Govou blessé de longue date, Anelka, Gignac et Briand forfaits dans la semaine, cela faisait déjà quatre titulaires potentiels à la trappe. Quant aux autres joueurs présents dans l’effectif français, comme Ribéry, Benzema ou Nasri, on a eu de cesse de nous expliquer qu’ils perdaient leurs super-pouvoirs dès lors qu’on les faisait jouer sur le côté droit. Ainsi Raymond Domenech était-il en quête d’une solution de rechange capable de jouer intelligemment côté droit. Il le dit lui-même : s’il a mis Luyindula, c’est « pour pouvoir jouer sur un côté et en même temps devant, un peu comme il le fait au Paris SG. Il fallait avoir un poids car Thierry Henry a tendance à se décaler à gauche. »
Et quand on cherche dans le paysage français des joueurs qui ont ce profil, on voit qu’il n’y avait rien d’évident. Giuly aurait pu faire un bon candidat s’il ne s’était pas bêtement compromis en écrivant un livre à charge sur le sélectionneur national. Loïc Rémy a été appelé, mais lancer un jeune joueur dans un contexte si difficile était très risqué. Enfin certains évoquaient Sinama-Pongolle, mais en quoi un remplaçant à l’Atletico Madrid aurait-il pu donner plus de garanties ? En revanche, Luyindula était disponible, expérimenté, sa force d’intégration dans un groupe avérée, et son profil correspondait à ce qui était recherché. Le faire jouer n’était donc pas si incongru.
Le bon match de Luyindula
Luyindula a donc eu 64 minutes pour montrer ce dont il était capable. Malheureusement, ses détracteurs ne retiendront que les trois duels manqués face au gardien : un tir sur le portier lituanien en début de match, une louche de Henry difficile à contrôler en fin de première mi-temps, et un duel où il pousse trop son ballon — conséquence du terrain désastreux. Mais il serait injuste de limiter son passage en Bleu à ce bilan. Le Parisien a apporté des qualités peu présentes en Équipe de France. Habitués depuis quelques années aux joueurs de couloirs qui ont fait de la vitesse leur arme unique, incapables de lever correctement le ballon une fois le débordement fait, ou alors aux meneurs incapables de songer à donner un ballon avant d’avoir touché douze fois le ballon, nous avons eu la surprise de voir un joueur certes pas très rapide, mais capable de faire des appels intelligents, des remises instantanées pleines de bon sens, et un bel effort dans la conservation du ballon. Du coup, plus qu’un intérim, une fois sur le terrain, Luyindula est devenu une solution évidente pour ses partenaires. Thierry Henry, qui n’est pourtant pas le premier à complimenter publiquement ses partenaires, a dit après la rencontre : « Il faut parler de Peguy Luyindula. Ce n’est jamais évident de revenir dans le groupe après plusieurs années d’absence. Ça faisait un moment. Il a même été contesté dans sa carrière, et ce soir, il a fait un très bon match, il aurait pu mettre un triplé. »
Et finalement, on voit que Luyindula a joué sur ses capacités. Il n’a pas été d’un grand réalisme, mais cela a toujours été son défaut. En revanche, c’est l’un des seuls français à avoir su se créer des occasions. La France a marqué un joli but juste après sa sortie, mais son remplaçant Benzema n’y est pour rien. Celui-ci a même été tellement ridicule dans ses prises de balle qu’il devient très difficile d’affirmer qu’il aurait dû jouer à la place de l’attaquant parisien. Et finalement, on peut même affirmer qu’aux côtés de l’attaquant euphorique de Barcelone, de la coqueluche du Bayern Munich, et du supposé meilleur joueur de L1, Luyindula n’a pas fait tâche, loin de là. C’est peut-être inquiétant pour l’Équipe de France, mais pour le PSG c’est une fierté : le club a été parfaitement représenté au niveau international, c’est là l’essentiel.