Hier soir, le PSG a perdu en coupe de France contre un modeste club de National. Le bon côté de l’affaire est qu’au moins, durant les douze années à venir, on n’entendra plus parler du syndrome Clermont avant chaque match face à un club évoluant dans une division inférieure. Désormais, on nous rabâchera sans cesse « le sinistre précédent Rodez ». Un peu de changement ne fait pas de mal.
Néanmoins, si cette défaite fait clairement tâche au milieu de l’excellente saison parisienne, elle devient presque anecdotique. Car contrairement aux saisons précédentes — où les coupes nationales devenaient une bouffée d’air frais face à la dure réalité du championnat, puis un moyen de sauver une saison bien compromise —, cette année, ces compétitions font office de bonus. Les gagner, c’est assurément gratifiant, mais s’en faire éliminer, cela permet d’alléger un calendrier d’ores et déjà démentiel [1] et il reste au PSG quelques épreuves à jouer à fond : la Ligue 1 et la coupe UEFA.
Le PSG voulait se qualifier
Cette défaite est amère, mais les échéances qui arrivent font que le club s’en remettra vite. Ce qui est bien plus dommage et surprenant, c’est que pour ce match face à Rodez qui est allé jusqu’aux prolongations, Paul Le Guen a décidé d’aligner tous ses titulaires, dans la mesure du possible [2]. Et ce alors que le Paris SG est dans une période de matches tous les trois jours, et que l’entraîneur parisien est clairement un adepte du turn-over dans les compétitions annexes. La question que l’on peut donc légitimement se poser est de savoir pourquoi diable Le Guen n’a-t-il pas mis une équipe de CFA, quitte à se faire éliminer avec de bonnes excuses, plutôt que de fatiguer les titulaires pendant 120 minutes ?
Sans être dans la tête du patron technique des Rouge et Bleu, une première raison apparaît évidente : Paul Le Guen ne voulait pas perdre ce match. Souvenons-nous du tollé qui avait suivi la défaite contre Schalke 04 à Gelsenkirchen, lorsque l’équipe alignée était composée en très grande partie de remplaçants, et alors même que le match ne compromettait en rien les chances de qualification. Et imaginez donc les réactions qui auraient suivi la rencontre si le PSG avait quitté la coupe de France en mettant sur le terrain son équipe réserve. Le Guen aurait balancé la compétition, n’aurait pas respecté son adversaire et aurait manqué de professionnalisme. Non, en l’occurrence, l’entraîneur parisien voulait que le PSG aille le plus loin possible dans cette compétition, et pour cela, il a jugé nécessaire d’aligner la meilleure équipe disponible. Et après en avoir tant entendu sur sa pseudo-volonté de sacrifier des compétitions, il convient de le redire : Le Guen voulait tout gagner.
Et pour ce match face à Rodez, ce n’était envisageable qu’en alignant son équipe-type du moment. La raison, il n’a cessé de la marteler dans les conférences de presse d’avant-match. Les quotidiens nationaux ont relayé ses propos, non sans une pointe de critique. Quand Le Guen disait qu’il redoutait cette équipe aveyronnaise constituée en partie de joueurs prêtés par des clubs de L1 ou issus des centres de formation, qu’il avait de vives craintes, l’élite du journalisme sportif jugeait que Le Guen en faisait trop, et qu’il ne disait cela que pour maintenir ses joueurs sous pression [3] ; un discours de façade en somme. Pourtant, s’il a tenu ces propos — et l’on a rarement entendu l’entraîneur parisien s’épancher à ce point sur les qualités d’un adversaire —, ce n’était pas un effet de style ou de la fausse modestie : c’est qu’il pensait réellement qu’il y avait danger.
Des enseignements pour samedi
Aussi Le Guen a-t-il jugé trop risqué de lancer des Barrada, Charbonnier ou Maurice dans un contexte aussi difficile, et a préféré compter sur ses meilleurs éléments. Hélas, il avait vu juste concernant la dangerosité de l’adversaire ; doublement hélas, il a surestimé la capacité de ses cadres à se transcender pour cette rencontre-là, et le PSG se retrouve ainsi éliminé après avoir fait jouer ses titulaires pendant 120 minutes. Il n’est pas question ici d’accabler les joueurs. Une baisse de performance ou de motivation sur un match parmi une dizaine, cela arrive et cela arrivera encore. Et au vu du calendrier, que cela soit tombé sur cette rencontre n’est pas plus mal. Si les Parisiens confirment leur grosse capacité de réaction après une déconvenue, alors ce revers sera vite oublié — l’élimination cinglante en coupe de la Ligue face aux Girondins semble déjà loin.
Pour revenir aux choix de Le Guen sur cette rencontre, il faut aussi songer au contexte qui entoure les matches à venir. À Lorient puis contre Marseille, Paris devra remodeler son milieu de terrain en raison des suspensions de Makélélé et de Sessegnon, et peut-être sa défense si la blessure de Sakho s’avère plus longue à soigner que prévue. En conséquence, plutôt que d’innover complètement lors de ces deux rencontres, Le Guen a peut-être voulu se servir de ce tour de coupe de France comme d’un laboratoire, afin d’avoir un aperçu de ce que pourrait donner l’équipe qu’il compte aligner en championnat. Et éventuellement d’effectuer des retouches et des recadrages en cas de mauvaise surprise. Et comme finalement, la plus désagréable des surprises est au bout de la rencontre, la soirée aura au moins eu le mérite d’avertir Le Guen sur les différentes rectifications à faire d’ici samedi.
Sans vouloir verser dans l’angélisme béat envers Paul Le Guen, il est important de préciser qu’au moins pour ces quelques raisons, ses choix d’avant-match résultent d’une réflexion cohérente. Malheureusement, cette cohérence disparaît toujours mystérieusement aux yeux de certains après une défaite. Si un choix ne s’est pas avéré payant, ce n’est pas pour autant qu’il est dénué de bon sens.